Mondo reverso, Tome 1 : Cornelia et Lindbergh
de Arnaud Le Gouëfflec (Scénario), Dominique Bertail (Dessin)

critiqué par Pucksimberg, le 21 janvier 2018
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
Au pays des hommes en robe et des femmes couillues
Je n'avais jamais lu une BD aussi originale dont le postulat de départ est que les hommes et les femmes échangent caractères et fonctions dans la société. Tout ceci en plein western ! Sur la quatrième de couverture il est question de "western transgenre". Cela définirait assez bien cette oeuvre audacieuse et terriblement bien pensée. Cornelia , une desperadette se retrouve en cavale avec Lindbergh, Cette femme de poigne se retrouve donc accompagné d'un homme au foyer. Mais elle est recherchée. On y croise des cowgirls et des indiennes, des saloons et des cirques ... Un univers complètement décalé !

Quelle bonne idée et quel talent ! Il fallait y penser et surtout donner de la cohérence à cet univers où tout est inversé. Il y a un vrai travail sur la féminisation des hommes et la masculinisation des ces femmes. Cela se perçoit dans leurs postures, dans leurs tenues vestimentaires et dans les rôles qui leur sont attribués. Ici ce sont les hommes que l'on siffle, ce sont les hommes qui ont une grande sensibilité, ce sont les femmes vont dans les saloons pour trouver du plaisir. . Ce ne sont plus les cowboys qui exhibent leur torse mais les femmes. Même le vocabulaire est touché par cette inversion. De nombreux termes sont devenus féminins dans un monde où la femme exerce son pouvoir comme Dieue , toubibe et bien d'autres.

Les dessins sont léchés et d'une grande qualité. Les paysages sont merveilleusement rendus et les visages et les corps sont représentés avec précision. Il y a de la violence, de la sensualité et de l'humour. Cette inversion des rôles entraîne quelques quiproquos, procédé souvent présent dans le théâtre de Marivaux, tout comme les travestissements. En même temps cette inversion des rôles interroge et permet de se questionner sur la répartition des tâches dans notre société et sur nos gestes.
Le lecteur perd totalement ses repères ! Cela nous demande de penser à l'envers afin de suivre cette histoire, sans compter que certains personnages sont de vrais travestis, entendez des femmes viriles qui veulent devenir des hommes moustachus doux. Et puis il y a aussi ces personnages qui ont changé de sexe à cause d'une potion. Cette bande dessinée dynamite la question du genre et le lecteur se laisse embarquer avec plaisir et curiosité dans cette folle odyssée sans limites.

Un grand souffle dans le monde de la BD !
Fausse bonne idée 4 étoiles

J'avais feuilleté longuement cette bd chez mon libraire, très attiré par le dessin très détaillé, le tout sur un ton sépia, de Bertail. Mais j'avoue n'étant guère grand fan de l'humour de fluide glacial, j'ai attendu que cet album soit disponible en médiathèque pour me lancer dans la lecture. Chose faite à présent.
Et bien, j'avoue que l'idée d'inverser les codes du western est assez plaisante (les hommes étant réduits au rôle de sexe faible) mais résiste mal sur une intrigue qui s'étire sur près de 90 pages et finit par être parfois ridicule (la romance de Cornélius -Cornélia- et Suzette - Lindbergh- en est la parfaite illustration).
L'humour est souvent lourd et je n'y adhère guère.

Bref, une fausse bonne idée que ce scénario, malgré un graphisme très réussi.

Hervé28 - Chartres - 55 ans - 10 juin 2018