Les pionniers de l'aventure humaine
de François Boucq

critiqué par Shelton, le 5 octobre 2017
(Chalon-sur-Saône - 67 ans)


La note:  étoiles
A relire car toujours d'actualité !!!
Puisque François Boucq va être président du festival Chambéry BD cette année, j’en ai profité pour relire quelques albums et en particulier Les pionniers de l’aventure humaine. François Boucq est un auteur qui est né en 1955 à Lille et qui a commencé à rencontrer le succès avec la revue (A suivre) dans laquelle il publiait des histoires courtes d’une grande qualité… Aujourd’hui, la revue a malheureusement disparu mais il nous reste ces recueils, heureusement…

On a pris l’habitude, un peu vite et de façon systématique, que Boucq faisait de la bédé absurde… Moi, je préfèrerais que l’on dise de la bédé humaine, profondément humaine et, si vous croyez qu’il y a un peu d’absurde dans notre humanité, alors, je vous autoriserais, exceptionnellement, à prononcer le mot d’absurde… Oui, les personnages de François Boucq sont des humains et il pointe avec un certain humour et une finesse remarquable, les traits caractéristiques de ces humains…

Ce premier recueil des histoires courtes est d’une drôlerie incroyable, d’une poésie surprenante, d’une humanité profonde et doté d’un sens politique cynique… En le relisant, je me suis pris d’un fou rire incroyable avec l’histoire La loi du Grand Nord que je vous laisserai découvrir sans vous en dire beaucoup plus…

Ce qui est certain, c’est que Boucq pointe du doigt le machisme, la chasse, le colonialisme, la bétonisation, la vie sociale, les artistes, les amoureux… Tout le monde y passe et on ne peut qu’être surpris de la modernité du propos. Oui, le recueil est paru en 1984 ! Les histoires sont parues dans la revue à partir de 1983… Oui, c’était il y a plus de trente ans !!! Et son succès est arrivé très vite, il est devenu un des piliers de la revue et je l’avoue, j’ai aimé son travail très vite…

On retrouve dans ce premier recueil une histoire de Jérôme Moucherot, peut-être une des premières, et cet agent d’assurance confronté aux clients et au monde du travail, à l’argent et à cette société urbaine, est un personnage que notre société d’aujourd’hui ne peut pas renier…

« Ici c’est la jungle, seuls les plus forts s’en sortent ! »

Certes, les dangers qui menacent notre assureur relèvent du fantasme, de l’angoisse, des fantômes intérieurs… mais je ne vois pas un élément à changer ! Cette force de la narration graphique de Boucq, appuyée sur un humanisme total et intégral offre au lecteur une leçon de vie pour ne pas dire de philosophie…

Absurde et drôle disent certains, humain, cynique et désespéré diront d’autres, génial tout simplement ai-je envie d’affirmer et pas seulement pour lui faire plaisir à la veille du festival de Chambéry…

Je m’interroge sur ses lecteurs… Samedi, vais-je voir des jeunes se précipiter vers lui, discuter avec lui, tenter d’aller à la rencontre de ce ptérodactyle de la bande dessinée… Après tout, pourquoi toujours dire dinosaure… et comme le dit Jérôme Moucherot :

« Les dangers sont multiples, nul n’est à l’abri de l’attaque d’un ptérodactyle ou d’un nuage de sauterelles… Y avez-vous pensé ? » En fait, à la réflexion, pas vraiment ! Heureusement, François Boucq ne vous attaque pas, il vous invite seulement à réfléchir à votre humanité avec un humour magnifique !