Grand Cirque Déglingue
de Marco Lodoli

critiqué par Pucksimberg, le 6 septembre 2017
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
Des insoumis lunaires à Rome
Ruggero, Rocco et Mariano sont trois italiens qui n'acceptent pas la société telle qu'elle est et qui se disent anarchistes. Afin de frapper fort et de marquer les esprits, ils souhaitent enlever les petits Jésus des crèches de Rome afin de leur rendre leur liberté, ce qui n'est pas une mince affaire surtout qu'ils envisagent de s'attaquer aussi à la Basilique Saint Pierre. L'un est enseignant dans un lycée privé dont les élèves sont loin d'être des lumières, le deuxième est le concierge du même établissement, le troisième a voulu reprendre les cours à 30 ans pour suivre le chemin de sa petite sœur Sara qui occupe l'esprit de nos trois compères.

Ce roman est très original par sa structure et ses personnages loufoques. Le roman alterne les narrateurs. Le lecteur passe d'un personnage à l'autre sans que le changement de narrateur soit clairement annoncé. Il y a tout de mêmes des indications dans chaque section qui nous font rapidement deviner qui s'exprime. Cela donne aussi l'impression qu'ils parlent tous d'une même voix, celle d'un anarchiste rêveur, loufoque et poétique à la fois. Certaines répliques et certaines situations sont amusantes, les répliques fusent et les propositions narratives sont surprenantes : la constitution d'une troupe avec des artistes atypiques, l'attentat envisagé ...
Il y a beaucoup de fantaisie dans ce roman et il faut que le lecteur accepte de se laisser porter par cette histoire et ses personnages lunaires et quelque peu perdus afin d'apprécier ce roman.

Derrière l'humour et la poésie, il y a un triste constat sur notre monde et notre condition humaine. Le mot "néant" revient à plusieurs reprises dans le roman. Tous ces êtres sont fragiles et estropiés, physiquement ou moralement. La folie n'est pas loin, l'alcool paraît apaiser les craintes. Cette humanité qui est donnée à voir peut émouvoir le lecteur. Il y a du Beckett et du Ionesco chez cet auteur italien où l'on en vient à rire de sujets graves.