Mon autopsie
de Jean-Louis Fournier

critiqué par Marvic, le 20 août 2018
(Normandie - 65 ans)


La note:  étoiles
"C'est vraiment pas marrant d'être mort"
Après avoir raconté ses fils, sa femme, sa fille, son père, sa mère, Jean-Louis Fournier parle de sa dernière rencontre, de la dernière femme de sa vie… ou plutôt de la femme de sa mort.
A 80 ans, il a fait don de son corps à la science.
Une belle jeune femme le choisit, qu’il baptise avec son éternel humour "Égoïne".
Au fur et à mesure de sa dissection, il évoque des moments de sa vie, des étapes, des réflexions, des rencontres faites pendant ses 80 années.

Avec son style si personnel de sensibilité, d’humour, de tendresse, d’ironie, de phrases qui font mouche, l’auteur, de la même façon qu’il livre son corps à Égoïne, se livre totalement, sans retenue ; une confession pour dire ses regrets, de n’avoir pu être un meilleur époux, ne pas avoir su dire ses sentiments (sauf à ses chats), livrant (osant livrer) le meilleur mais aussi le pire, demandant pardon aux oiseaux…
"Quand elle m’a ouvert le cœur, quelque chose s’est échappé et est tombé par terre…
Elle s’est baissée pour ramasser.
C’était une feuille d’artichaut."

Un peu gênée en commençant la lecture, j’ai été rapidement emportée, touchée par ce récit.
Je ne sais pas si ce livre sera le dernier, mais il est pour moi, dans la lignée des "Où on va papa", ou "Veuf". Superbe.
Un régal 9 étoiles

Jean-Louis Fournier a passé le cap des 80 ans. Il imagine comment va se dérouler sa mort. Il ne croit plus trop à une vie dans l’au-delà. Comme il a fait don de son corps à la science, il sait qu’il va se retrouver dans un des tiroirs de la morgue, totalement nu, dans l’attente qu’un étudiant en médecine veuille bien s’intéresser à son sort. Il est choisi par une jeune et jolie étudiante qu’il prénomme Egoïne, car elle a vite fait de s’emparer d’une de ses mains et de la détailler en osselets. Ce séjour dans l’antichambre de la mort sert de prétexte à Fournier pour faire le point sur sa vie, ses amours, ses emmerdes. Sa femme morte brutalement. Ses deux fils handicapés. Sa fille perdue de vue depuis qu’elle est devenue membre d’une secte vaguement christique. Seules consolations, ses succès littéraires, entamés dès son premier ouvrage, sa « Grammaire française et impertinente ».
Dans « Mon autopsie », l’auteur poursuit son auto-fiction jusqu’au-delà de la mort. Bien que le thème soit sinistre au possible, il parvient une fois encore à faire entendre sa petite musique impertinente et décalée. Humour et auto-dérision encore et toujours. Mais cette fois peut-être avec nettement moins de légèreté qu’à l'ordinaire. Il revient sur nombre d’épisodes déjà racontés dans ses précédents ouvrages. Seule nouveauté : une allusion à sa collaboration avec Desproges. Le style est toujours aussi magnifique, dépouillé, minimaliste et efficace. Et le lecteur retrouve cette fois encore, au fil des pages et au détour des paragraphes, nombre de pépites qui font de cette lecture un régal. « Grâce à Dieu, des mauvaises pensées, j’en aurai eu toute ma vie, elles auront été le meilleur remède à mes angoisses, elles m’auront aidé à vivre. »
« Notre société prône la modération, elle interdit déjà le sel, bientôt la vie n'aura plus de goût. Je suis parti au bon moment. »
Même s’il peut agacer avec son narcissisme ou avec sa manie de vouloir faire rire de bien tristes choses, il faut absolument lire Fournier, l’un des derniers représentants de l’esprit français.

CC.RIDER - - 65 ans - 16 février 2020


On s'amuse beaucoup avec Fournier, comme d'hab ! 8 étoiles

On disait que Jean-Louis Fournier était mort et qu’il avait donné son corps à la science. Egoïne, une jeune et jolie médecin se charge de le disséquer, sous l’œil attendri de notre macchabée qui a le don de tout voir, tous ressentir. C’est, pour l’auteur, l’occasion ou jamais de raconter sa vie, ce qui n’est pas d’un intérêt premier, mais comme c’est dit avec humour, le récit passe très bien.
On s’amuse beaucoup, comme d’hab, avec Fournier.

Extraits :
- Plus de mille fois, j’ai récité « Ne nous laissez pas succomber à la tentation » Heureusement, Dieu ne m’a jamais exhaussé.

- A la rubrique « personne à prévenir en cas d’accident », j’ai toujours écrit consciencieusement : Dieu.

- On pleure quand on arrive sur terre, pourquoi on râle quand on doit partir. Jamais content.

- C’est bon d’être celui dont on peut dire ; vous êtes le premier …

- Mes yeux sont ordinaire, ni bleus ni noirs, ils sont un peu verts, couleur soupe aux légumes.

Catinus - Liège - 72 ans - 28 octobre 2019