Ville avoisinant la Terre
de Jorj A. Mhaya

critiqué par Blue Boy, le 2 décembre 2016
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Kafka à Beyrouth
Première œuvre d’un auteur libanais, cette bande dessinée aux accents surréalistes est un appel au soulèvement contre les pouvoirs iniques, doublé d’une réflexion philosophique sur la condition humaine.


Un homme arpente les rues en direction de son domicile, après une journée de travail routinière. Mais parvenu dans son quartier, il constate que son immeuble a tout bonnement disparu. S’ensuit alors une longue errance à travers une ville qu’il ne reconnaît plus, peuplée de personnages tous plus étranges et excentriques les uns que les autres.


D’emblée, cette bande dessinée retient l’attention par ce graphisme unique au lavis noir et blanc, avec des personnages à l’aspect à la fois réaliste et caricatural. Par moments, on est plus proche de la peinture que de la BD. Rien d’étonnant quand on sait que l’auteur est peintre et illustrateur, en l’occurrence Jorj A.Mhaya, d’origine libanaise.

Impossible de classer cette œuvre tant elle est personnelle, empruntant à des genres connus (thriller, fantastique, comics US de super-héros) revisités sous un angle poético-philosophique. Traversée par une angoisse sourde et une frénésie de fin des temps, la narration est caractéristique d’un auteur né dans un pays souffrant d’une guerre civile éruptive depuis des décennies, avec à la clé moult questionnements sur la condition humaine et l’absurdité du monde.

Force est de constater que ce récit surréaliste aux tonalités kafkaïennes, si intrigant soit-il, souffre d’un scénario pas suffisamment charpenté et de personnages trop anecdotiques. Si le message que l’auteur cherche à faire passer est perceptible (on doit se révolter contre les cinglés qui nous aliènent et nous gouvernent), il manque la profondeur nécessaire pour en faire une œuvre vraiment marquante. A l’instar du titre, trop bizarre, pas évident à retenir (traduction trop littérale ?), et par conséquent un peu bancal. C’est bien dommage, car « Ville avoisinant la Terre » sort de l’ordinaire et a été élaboré avec sincérité, mais on pourra aussi faire preuve d’indulgence dans la mesure où il s’agit d’un premier album.