La Maison des coeurs brisés
de Bernard Shaw

critiqué par Septularisen, le 16 novembre 2016
( - - ans)


La note:  étoiles
Fantaisie dans le style russe sur un thème anglais
L’ancien capitaine de marine Shotover vit, avec sa fille Hésione Hushbaye et son gendre Hector Hushbaye, dans une grande maison de campagne isolée en Angleterre, à la lisière du Sussex.
Hésione a invité une jolie jeune fille, Elie Dunn et son père Mazzini Dunn. Elle espère convaincre Mazzini de rompre les fiançailles d’Elie et d’Alfred Mangan, un homme âgé, riche capitaine d’industrie, qui a rendu de nombreux services au père d’Elie. Pour cela s’il le faut elle est prête à «se sacrifier» et à séduire Mangan qu’elle a aussi invité.

Au cours d’une conversation Elie avoue à Hésione ne pas vouloir épouser Mangan, elle est tombée amoureuse d’un certain Marcus Dannley, un très bel homme qu’elle a rencontré au cours d’un séjour à Londres. Malheureusement pour elle, celui-ci se révèle n’être qu’Hector, le mari d’Hésione, amateur de «séjours galants en célibataire» à Londres. Déçue de cette méprise, Elie accepte finalement d’épouser Mangan… Trop tard ! Celui-ci vient de succomber au charme d’Hésione...

Ce même jour, Lady Ariane (Addy) Utterword, la fille cadette du capitaine Shotover, revient dans la maison familiale après 23 années d'absence. Elle a rompu avec son mari et sa belle-famille, mais est maintenant l’objet des assiduités de Randall Utterword son beau-frère qui débarque lui aussi à la maison. Très vite Hector et elle tombent sous le charme l’un de l’autre…

« La Maison des cœurs brisés » est une pièce en trois actes (le troisième étant très court), jouée pour la première fois par le «Theatre Guilde» au Garrick Théâtre à New York le 10 novembre 1920, révélatrice d’une époque et d’une Angleterre en pleine mutation, en pleine confusion et assaillie de doutes. Le spectre de la guerre – la pièce a été écrite par SHAW en 1916/1917 -, sous-tend d’ailleurs toute l’intrigue, à tel point que la fin de la pièce est émaillée d’explosions.

L’auteur irlandais s’inspire ici, librement, de « La Cerisaie » du russe Anton TCHEKHOV. Le sous-titre de la pièce est d’ailleurs sans équivoque : «Fantaisie dans le style russe sur un thème anglais ». Mais ce qui ne pourrait n'être qu’un banal vaudeville, plein de confusion, devient sous la plume, et le génie de George Bernard SHAW, un véritable drame.
Les personnages sont incroyables, chacun ayant à tour de rôle une « scénette » avec un autre. Leur profondeur psychologique est d’ailleurs très étonnante (notamment pour Elie et Hésione), pour une pièce de théâtre si courte ! L’écriture reste très simple et si facilement accessible à tous. L’auteur prête à ses personnages des répliques inspirées, drôles, fantaisistes, décalées, détournées etc… Le plus surprenant est encore la maison, construite en forme de bateau, et qui devient au fur et à mesure du déroulement de la pièce elle-même un personnage à part entière...

Rien à redire ici, c’est vraiment du théâtre à son plus haut niveau et une très bonne introduction au théâtre du grand auteur irlandais.

Rappelons que George Bernard SHAW a été le lauréat du Prix Nobel de Littérature en 1925.