Aliénor d'Aquitaine
de Régine Pernoud

critiqué par Veneziano, le 18 septembre 2016
(Paris - 46 ans)


La note:  étoiles
Une femme en politique
Il est certes dur pour une femme d'entrer en politique et de seulement rester libre, de surcroît en politique. C'est pourtant ce double défi que s'est lancé Aliénor d'Aquitaine.
Elle a certes bénéficié d'un immense fief qui a assis sa puissance, au point de devenir Reine de France puis d'Angleterre, avant de jouer le rôle de la puissante Reine-Mère de Richard Coeur de Lion. Son tempérament, ses valeurs, son sens de la famille ont forgé un personnage hors norme et presque unique, au moins pendant le millénaire médiéval. Elle n'a pas peur d'accompagner le Roi de France en croisade, au risque de fragiliser son couple. Ambitieuse certes, elle reste fidèle à ses idées et à son fief, car elle est avant tout une terrienne. Aussi le procès en traitrise est-il plus délicat à instruire qu'il n'y paraît.
Cet ouvrage est rédigé par une éminente vulgarisatrice des équilibres et mystères du Moyen-Age. Le plan est chronologique, le ton est pédagogue, l'intrigue presque romancière dans sa tournure. Il est donc intéressant et agréable à lire.
Aliénor et son siècle. 10 étoiles

« Aliénor d’Aquitaine est une personnalité féminine qui a dominé son siècle – et quel siècle ! ». C’est ce que nous dit d’entrée Régine Pernoud et quand on a lu sa biographie, on en est convaincu. Son siècle c’est le XIIème. C’est le siècle des poètes, des troubadours, de Chrétien de Troyes, de Tristan et Yseult, des romans de chevalerie, de la quête du Graal, Perceval et Lancelot, le Roi Arthur, Merlin l’enchanteur et de combien de merveilleux conteurs ! Aliénor a pendant toute sa vie favorisé cette littérature qui nous charme encore aujourd’hui. C’est aussi le siècle des croisades, des cathédrales romanes et du début du gothique ; c’est encore le siècle d’un réveil religieux extraordinaire sous l’impulsion de saint Bernard de Clairvaux et de l’ordre de Frontevrault tellement gratifié des largesses d’Aliénor, et dont l’abbatiale abrite son gisant qui la représente un livre à la main et qu’on peut encore admirer aujourd’hui.

Étant un féministe patenté, comme probablement l’était Régine Pernoud, je pense qu’une historienne est plus à même qu’un historien pour raconter la vie d’une héroïne ; mais ça présente l’inconvénient que certains personnages masculins sont injustement dévalués. Par exemple, ici c’est le cas du premier mari d’Aliénor, le Roi de France Louis VII. Pour Régine Pernoud, c’était un homme sujet au découragement, facile à duper, un moine raté, un pleutre qui était triste comme la pluie ; ce n’est pas vraiment ce que disent tous les historiens mais il est parfois bon que les historiens aient des opinions tranchées, ça rend leurs récits plus attrayants.

Comme toujours, quand un biographe étudie la vie d’un personnage, au fur et à mesure qu’il le découvre, il l’apprécie. Ici, Régine Pernoud a non seulement apprécié Aliénor, elle l’a sublimée au point qu’on peut voir ici et là quelques a priori… disons discutables. Quand, par exemple, elle est partie en croisade avec son mari Louis VII, Aliénor partageait la tente de son grand ami d’enfance, un certain Geoffroy-le-Bel… en tout bien tout honneur, nous dit Régine Pernoud : les insinuations des mauvaises langues sont, d’après elle, « pures calomnies » ! Mais voyons !

Plus tard Aliénor quitta son pauvre mari et s’éprit du jeune et beau Henri Plantagenêt, duc de Normandie et future Roi d’Angleterre, qui était, comme chacun sait, le fils de ce Geoffroy-le-Bel et de la Reine Mathilde, qui elle-même était la petite-fille de Guillaume le Conquérant. Aliénor était reine de France et la voilà bientôt reine d’Angleterre. Mais c’était un mariage qui, selon l’auteur(e), satisfaisait autant les amours que la politique ; et là, on ne peut que lui donner raison pour les amours : Henri « parlait aux dames courtoisement d’amour » et ces deux là étaient faits l’un pour l’autre.  ; au point de vue politique, ce mariage changea le cours de l’Histoire, pour un bien ou pour un mal ? ce sera au lecteur d’en juger. Mais, à cette époque, il faut croire que les hommes étaient volages ; après avoir eu huit enfants avec Aliénor, Henri eut des faiblesses coupables pour la belle Rosemonde ; ce qui lui valut la vindicte de Thomas Becket qu’il finit par assassiner ignominieusement pour qu’il se taise.

Il serait beaucoup trop long, dans une critique « éclair », de résumer la vie de notre héroïne et de sa nombreuse et tumultueuse progéniture. Rappelons seulement que parmi ses dix enfants issus de ses deux mariages, il y eu Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre dont les aventures valent la peine d’être lues sous la plume de Régine Pernoud : là, on est en plein roman d’aventures ; c’est amusant, édifiant, rempli de détails savoureux… Ah ! si on nous avait enseigné l’Histoire comme nous la raconte Régine Pernoud !

Aliénor avait aussi une fille, Mathilde d’Angleterre, qui devint Impératrice du Saint Empire Romain Germanique pour avoir épousé l’Empereur Henri de Saxe dit Henri-le-Lion. Aliénor avait encore marié une autre de ses filles, Aliénor aussi, au Roi Alphonse III de Castille : cette fille est la mère de Blanca qui, sous l’instigation de sa grand-mère, a épousé le fils de Philippe Auguste, l’hérité du royaume de France, Louis VIII ; pour les Français c’est devenu la Reine Blanche de Castille, la mère de Louis IX mieux connu comme saint Louis. Ses autres filles avaient aussi épousé des fils de roi et c’est donc à raison que Aliénor d’Aquitaine est gratifiée par l’auteur(e) du titre tant envié de grand-mère de l’Europe. Tout ça paraît un peu compliqué mais quand c’est raconté par Régine Pernoud, c’est très facile à suivre, d’autant plus qu’en fin de volume il y a des arbres généalogiques très clairs.

Sur les trois cents pages de sa biographie, Régine Pernoud nous dit tout, c’est condensé mais c’est toujours d’une plume enlevée, très vivante et très claire. Elle raconte l’Histoire comme un roman d’aventure peuplé de multiples personnages détaillés dans toute leur humanité, avec leurs qualités et leurs défauts, leur grandeur et leur faiblesse…

Avec ses quelques « a priori » qui font sourire et ses parti pris, disons féministes, cette excellente historienne, spécialiste du Moyen-Âge, a voulu restaurer la mémoire d’Aliénor d’Aquitaine contre les historiens qui ont été jusqu’à voir en elle « une prostituée publique, une femme démoniaque, une sorte de mégère dominée par la haine… ». Grâce à sa documentation époustouflante elle est arrivée à la remettre sur son piédestal et son « Aliénor d’Aquitaine » est une véritable réussite du genre.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 11 mars 2024


Un bon roman historique 7 étoiles

Avec Aliénor d’Aquitaine j’ai découvert une histoire intéressante, celle de cette femme qui fut Reine de deux des plus grands royaumes de l’époque.

Régine Pernoud rend l’histoire d’Aliénor, dont le destin fut hors du commun, très vivante et assez haletante. L’auteure ne s’éternise pas sur des détails insignifiants, ce qui peut parfois gâcher la lecture, défaut assez récurrent dans les romans historiques. Pas besoin d’être un érudit en histoire pour comprendre ce roman, même si parfois je me suis un peu perdu parmi les nombreux Louis, Jean, Guillaume et j’en passe.

Mon seul bémol se situe au niveau d’un certain parti pris par la romancière, du moins est-ce mon ressenti, par rapport à certains personnages. J’ai trouvé, par exemple, les portraits de Louis VII et Phillipe-Auguste très caricaturaux, surtout si l’on compare à Aliénor d’Aquitaine proche de la perfection.

Parmi les grands auteurs historiens, je préfère Maurice Druon, notamment pour l’humour distillé dans ses œuvres historiques. Néanmoins, Aliénor d’Aquitaine n’en reste pas moins une lecture agréable, enrichissante culturellement parlant, bref un bon roman historique.

Sundernono - Nice - 41 ans - 3 mai 2021


Une femme au moyen âge . 8 étoiles

Régine Pernoud est une vulgarisatrice de talent et elle le démontre encore une ici dans ces pages.
C'est clair, informatif, distrayant, captivant, bref une réussite.
Même si elle s'écarte parfois d'Aliénor pour évoquer son environnement politique cela reste un livre de référence pour découvrir cette reine de France et d'Angleterre,arrière grand-mère de Saint Louis.
Il me semble, mais c'est une considération personnelle, qu'Aliénor est un peu oubliée de nos jours.
Pourtant elle est à la croisée de l'Histoire de notre pays et des conséquences guerrières qui vont suivre.

Maranatha - - 52 ans - 9 août 2020