Justin
de Gauthier

critiqué par Blue Boy, le 21 mai 2016
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Just in the wrong body
Justine souffre d’être née dans la peau d’une fille et n’aspire qu’à une chose : devenir Justin. L’auteur raconte la première prise de conscience, fugace et soudaine d’être un garçon, puis le déni de son identité féminine, la souffrance, le regard des autres, et enfin la décision, une fois majeur, de rompre avec son passé et d’entamer sa métamorphose en homme, celui qu’il a toujours été.

Dans cette petite BD en noir et blanc, Gauthier évoque les moments marquants de sa vie, de l’enfance jusqu’à l’âge adulte, l’incompréhension de l’entourage proche, les brimades des camarades et les blessures morales qui en découlent. Il montre comment s’est imposée progressivement la nécessité de recourir aux hormones et enfin à la mammectomie (ablation de la poitrine).

À la fois un peu naïf et étrange, le dessin dans ses maladresses est celui de quelqu’un qui a eu du mal à trouver sa place dans le monde, devant être plus envisagé comme une écriture. Tel un jeu de miroir, il bouscule notre conception de la normalité avec ces êtres vaguement mutants, mi-humains mi-animaux. Ici, l’anormal n’est pas seulement cette fillette qui aurait dû être un garçon, mais nous tous, les soi-disant « normaux », malicieusement affublés par l’auteur d’un drôle de museau, tel un faux nez grotesque servant à masquer notre peur de la différence, notre peur de l’autre qui ne correspond pas à la norme, comme on aimerait qu’il soit.

Si l’ouvrage a probablement servi d’exutoire à son auteur, on peut regretter sa brièveté (104 pages au format comics qui se lisent en à peine dix minutes). J’aurais personnellement apprécié un récit plus étoffé, moins superficiel. L’auteur semble se contenter de survoler cet exercice introspectif, avec des anecdotes à la limite du cliché. Le sujet étant peu traité en BD, le lecteur curieux pourra toutefois y trouver un certain intérêt, mais n’ayant guère le temps de s’installer dans l’histoire, peinera à ressentir véritablement de l’empathie - et a fortiori de l’émotion - pour le personnage de Justin.