La dot de la Mère Missel
de Pierre Tourangeau

critiqué par Libris québécis, le 25 janvier 2016
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Les Étudiants de gauche
Le milieu universitaire n’est pas toujours fréquenté par des âmes en quête de connaissances. Pierre Tourangeau en a fait la démonstration dans La Dot de la Mère Missel. Là comme en politique, on utilise sa sphère d’activité pour exercer un pouvoir qui corrompt à la longue les saines relations que les étudiants entretiennent avec leurs pairs et le personnel enseignant, voire administratif. Qu’un groupuscule maoïste ou trotskiste s’amène sur le campus, et l’ambiance pourrit à cause de l’obligation tacite de voir le monde à l’aulne de sa mesure idéologique.

Le roman souligne la ferveur des néophytes communistes des années 70. Il précise surtout l’action de ces adeptes qui veulent contrôler non seulement la pensée, mais aussi tous les services mis à la disposition des étudiants afin de les engourdir dans les vapeurs de l’alcool et de la fumée illicite. Larry, le héros, n’est pas dupe des manigances de ses confrères de la Gauche. En tant que responsable de la comptabilité de la Coop, des distributrices et du bar de l’université, il représente l’ennemi à abattre. Mais c’est un ennemi de taille. Avec l’aide de la Mère Missel, responsable du kiosque à journaux, il se sent prêt à affronter ce groupuscule dont les activités ne sont pas toujours des plus louables. Pour s’y faire, il remonte la filière qui assure sa main mise sur le campus. Ce qu’il découvre finalement est du ressort de la police. En somme, ce roman débouche sur un polar mené tambour battant.

Larry est un homme d’action qui transcende les chapelles doctrinaires. Il aime marcher sur des œufs au risque de faire des omelettes. Son parcours l’amène à découvrir un monde qui ébranle son idéal philanthropique. En fait, le héros est un excessif qui consacre son énergie physique à la quête de la vérité. Comme il doute de tout, y compris de lui-même, il force continuellement le destin pour trouver les bornes à suivre. Même en amour, il cherche « des contrées inconnues où la main de l’homme n’a jamais mis la queue ». Sa « licorne adorée » subit à son insu les contradictions de son homme, qui éprouve de la difficulté à trouver le juste milieu des choses.

C’est un roman dont les excès du héros peuvent finir par lasser. Malgré tout, La Dot de la Mère Missel couvre bien la décennie qui a tenté d’imposer la lecture du monde selon les grilles marxistes. À partir d’un sujet aride, Pierre Tourangeau a su éviter l’écueil du document idéologique. Il amène des faits qu’il organise autour d’une action qui conduit à une enquête policière. Tous les ingrédients contribuent à faire de ce roman instructif une lecture agréable autant au niveau de l’écriture que de la structure.