L'espoir, cette tragédie
de Shalom Auslander

critiqué par Marvic, le 22 mai 2016
(Normandie - 66 ans)


La note:  étoiles
Le pire est toujours sûr
Dès la première page, le ton est donné.
"Vous achetez une arme de poing -pour vous protéger – et le soir même vous êtes terrassé par une crise cardiaque.
Vous installez de nouvelles serrures sur vos portes, des grilles à vos fenêtres autour de votre maison, et puis le médecin téléphone : C'est un cancer."
Solomon Kugel, persuadé que le pire est toujours sûr, est très préoccupé par ses "dernières paroles" et par l'épitaphe qui restera dans la mémoire de son fils.

Quand il achète une maison ancienne avec son épouse Breela à Stockton, la ville où il ne se passe jamais rien, il pense qu'il va pouvoir élever son fils en toute sécurité.

Car Solomon est terrifié par le monde, terrifié par les dangers qui menacent Jonas son petit garçon (à qui il demandera pardon d'être responsable de sa naissance).
Pris entre les exigences de sa maman, "fausse" rescapée de l'holocauste, de son épouse, de son locataire, de ses problèmes d'argent et d'une insoutenable odeur dans la maison, la découverte d'Anne Franck dans son grenier va le conduire dans un engrenage infernal.
Rien pour soigner son anhédonie : son "incapacité à éprouver du plaisir" qu'avait diagnostiqué un psychiatre. "Ce à quoi Kugel avait rétorqué que non, ce n'était pas une incapacité, c'était la conscience que le plaisir n'est qu'un prélude à la souffrance, à quoi le psychiatre avait répondu : Exactement."

Et pourtant, il fait des efforts incroyables auprès de tous. Il voit régulièrement un psy qui lui explique qu'il faut mieux ne rien attendre, que c'est la seule solution pour éviter de souffrir. Il mange bio alors même qu'il a des soucis financiers.
"à Mère Nature, les aliments étaient purs, naturels et extraordinairement coûteux. Désormais, on payait surtout pour ce que l'on n'avait pas… Une seule de ses boites, sans poison, toxine, pesticide... vous aurait obligé à contracter une deuxième hypothèque."

Associant un humour iconoclaste (qui pourra choquer ou déranger) et des réflexions parfois très pertinentes, une lecture sympathique, jubilatoire, drôle.