Derniers quarts de travail
de Marie-Paule Villeneuve

critiqué par Libris québécis, le 28 novembre 2015
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Le Monde du travail
Marie-Paule Villeneuve est une auteure très préoccupée par le monde du travail. En 1999, elle faisait publier L'Enfant cigarier, un roman qui présentait un enfant de neuf ans à l'emploi d'une usine de Sherbrooke. Avec Derniers Quarts de travail, un recueil de nouvelles, elle revient à la tâche pour dénoncer les congédiements abusifs et les désenchantements afférents à l'exercice d'un emploi.

Les protagonistes sont les jouets de leurs employeurs ou les victimes d'un système qui détruit leur passion pour le métier choisi. Après s'y être préparés en fréquentant les institutions ad hoc, ils se voient indiquer sans ménagements la porte de sortie ou ils sont pris dans un tourbillon qui les épuise. On voit ainsi défiler une coiffeuse d'âge mûr confinée à l'entretien de perruques, une graphiste obligée de trahir son art, une fonctionnaire mise de côté pour assurer la réputation de sa supérieure immédiate, un professeur disqualifié pour refuser le laxisme de la notation, un employé d'une chaîne de montage remercié à cause d'une aile de « char » égarée...

L'inhumanité caractérise cet univers qui déprime tout salarié, même le plus enthousiaste. La maladie ou la fuite devient souvent l'héritage de ceux qui ont intégré le marché de l'emploi en toute bonne foi. L'auteure évite les exemples qui discréditeraient son oeuvre. Ils sont empruntés à notre actualité, telle cette serveuse de restaurant qui a servi de bouclier dans une fusillade à Montréal-Nord.

Bref, c'est un questionnement sur notre implication dans le monde du travail. Sommes-nous seulement des pions sur l'échiquier d'une économie insensible à l'épanouissement de ceux qui y contribuent ? Marie-Paule Villeneuve étaie sa thèse avec beaucoup d'unité et avec une écriture maîtrisée et parfois même rieuse pour susciter l'éveil des consciences au lieu de la pitié.