Tragédies complètes
de Euripide

critiqué par Jules, le 2 février 2004
(Bruxelles - 79 ans)


La note:  étoiles
Les Troyennes
Les livres « Euripide – Tragédies complètes » comptent dix tragédies dans le volume un et neuf dans le volume deux. Ma critique précédente concernait « Iphigénie à Aulis »
Pour celle-ci, je mets le titre en tête de critique.

Troie vient d’être vaincue et la pièce commence par un dialogue entre Poséidon et Athéna.

Il faut savoir qu’Apollon et Poséidon ont toujours été du côté des Troyens, alors qu’Athéna a toujours soutenu les Grecs. Poséidon se méfie donc d’Athéna quand celle-ci vient lui proposer une alliance. Mais il a tort ! Elle est vraiment furieuse, car elle n’admet pas le comportement des Grecs après la victoire.

Les dieux avaient demandé de la mesure, or ils massacrent tout ce qui bouge et qui n’a pas un véritable intérêt pour eux. Cassandre a été enlevée alors qu’elle s’était réfugiée dans le temple d’Athéna, Priam égorgé devant l’autel du temple de Zeus etc.

La déesse demande donc à Poséidon de faire en sorte que le retour des Grecs se passe le moins bien possible. Qu’il fasse souffler les vents et déchaîne les océans. Que beaucoup périssent et que les autres mettent du temps à retrouver leur foyer. On sait ce que sera ce retour pour plusieurs d’entre eux !

Lors du partage entre les chefs, Hécube, femme de Priam a été donnée à Ulysse qu’elle qualifie d’impur et de perfide. Alors que Cassandre chauffera le lit d’Agamemnon, Andromaque devient une partie du butin de Néoptolème, fils d’Achille.

Et pourtant, Cassandre avait été élue par Apollon lui-même ! Elle qui devait rester vierge et vivre sans mari sera donc une des maîtresses du Roi d’Argos. Mais Cassandre jure à sa mère qu’elle portera le deuil et le sang dans la maison de cet homme. On connaît la suite !…

On trouve cependant le même genre de paroles dans la bouche de cette jeune femme que dans celle d’Iphigénie, fille d’Agamemnon, quand elle dut se rendre au sacrifice. Elle prétendit que celui-ci lui apporterait la gloire éternelle et que son nom ne serait jamais oublié. Quant à Cassandre elle dit que si Pâris n’avait pas enlevé Hélène son nom aurait à jamais disparu et qu’il a permit à Hector de faire connaître sa valeur, ce qui n’aurait pas été le cas si les Grecs n’étaient pas venus.

Andromaque dit à Hécube qu’elle préférerait mourir et s’attire cette réponse : « Comment peut-on, ma fille, comparer vie et mort ? L’une est néant, l’autre admet encore l’espérance. » et Andromaque de lui répondre : « Être mort, ne pas être né s’équivalent, je pense, et mieux vaut mourir que de vivre dans la douleur. » Et la pauvre ne connaît pas encore tous les malheurs qui l’attendent !… Son fils et celui du grand Hector, Astyanax, est voué à être tué en étant jeté au sol depuis les remparts de Troie.

Intéressante cette différence de façon de voir entre Cassandre et Iphigénie d’une part et Andromaque de l’autre. En effet, les deux premières jouent la gloire après la mort au contraire de la troisième. On peut en effet se poser la question de savoir à quoi sert la notoriété post-mortem, puisque le mort n’en sait rien et n’en profite en tout cas pas ! Hector, lui, n’aura même pas de descendants pour en profiter. Pour les autres, il est quand même plus agréable d’être le descendant d’un grand homme que d’un assassin !

Une superbe scène est celle dans laquelle Ménélas retrouve Hélène. Celle-ci tente de se justifier en disant qu’elle n’est responsable de rien. Selon elle, les premiers responsables sont Priam et Hécube qui n’ont pas eu le courage de tuer leur fils, alors que l’oracle avait averti qu’il provoquerait la ruine de Troie et de sa famille. Les seconds responsables sont les dieux dont elle n’a été que le jouet. Elle n’est qu’une victime dans cette affaire… Ménélas ne semble pas se laisser faire et dit qu’il va la ramener à Sparte pour l’offrir en sacrifice à toutes les femmes de ses guerriers morts aux combats.

Quant à son opinion sur les femmes, je vous en laisse juge… « Et de retour en Argolide elle mourra, la misérable, misérablement, selon son mérite. Et toutes les femmes en apprendront à se conduire. Lourde entreprise. Mais son supplice tiendra en respect leurs désirs déchaînés, si menaçants qu’ils soient. »

La cause féministe avait encore un peu de pain sur la planche !…