La porte rouge
de Valentine Goby

critiqué par Débézed, le 24 juillet 2015
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Fleur de ZUP
C’est beau, c’est bourré de tendresse et ça fleure bon la poésie cette petite histoire écrite par Valentine Goby, à l’intention d’une classe de seconde d’un lycée de la banlieue parisienne, d’après une série de photos d’Hortense Vinet. Elle a su à partir de ces documents représentant, à travers des lucarnes, des trous, un monde déshumanisé, minéral, dur, décrépit, inventer une fiction étonnante, émouvante, un peu trop moralisatrice sans doute mais pleine d’espoir. De l’espoir dont manquent tellement les adolescents qui peuplent ces cités sans âme.

Dans sa cité à elle, Dora, jeune lycéenne, se cloître dans l’appartement où elle vit avec sa mère, dehors elle a vu le diable mais elle ne veut le dire à personne, à travers sa fenêtre elle regarde la rue peuplée des seuls couchers de soleil. De l’autre côté du mur, Charlie, un jeune garçon court, court, court, pour fuir toujours l’appartement où il vit, l’appartement qui sent mauvais, qui sent son père ivrogne et violent. Un soir Dora ose sortir pour une raison insignifiante, ramasser une ordure jetée par une main indélicate, et chaque soir le rituel se répète avec une telle régularité qu’elle finit par attendre cette canette qui est le seul lien qui la relie à la société. Derrière cette canette mal élevée, il y a une main, quelqu’un, elle voudrait savoir qui mais elle n’ose pas et pourtant cet objet insignifiant, sale, va la conduire vers l’autre, l’autre qui va lui tendre la main.

J’aime l’écriture de Valentine Goby, je l’ai déjà écrit plusieurs fois, j’aime aussi cette histoire, même si elle est très morale, car elle est destinée à des adolescents en totale perte de confiance. Elle leur dit qu’ils doivent lutter pour vivre selon leur envie, se vêtir selon leur goût, une mini jupe ne fait pas une pute, et choisir leur métier selon leur vocation. Elle dénonce avec tendresse et amour tous les préjugés, tous les a priori, qui accablent cette jeunesse grandissant dans un monde sans humanité où seule la violence est vivace. Avec ces mots, ses mots, elle les aide à croire que les fleurs poussent aussi sur les tas de gravats et qu’un « Petit Prince » peut aussi courir autour des barres de la zone.

Un livre pour les adolescents que leurs parents feraient bien de lire, ils y prendraient certainement plaisir et ils comprendraient peut-être mieux leurs enfants.