Confidences à Allah (version BD)
de Saphia Azzeddine, Eddy Simon (Scénario), Marie Avril (Dessin)

critiqué par Le rat des champs, le 1 juillet 2015
( - 74 ans)


La note:  étoiles
Adaptation somptueuse en bédé
Le magnifique roman éponyme de Saphia Azzeddine méritait une belle adaptation en bédé, et ici, sans la moindre restriction, on est vraiment dans le tout haut de gamme. L'adaptation du livre par Eddy Simon, le dessin et la mise en couleurs de Marie Avril sont de très grande qualité et restituent impeccablement la triste vie de Jbara qui a eu le tort de naître dans un patelin pauvre du Maghreb, qu'elle qualifie de trou du cul du monde, où les femmes ne représentent rien de plus qu'un objet haram, impur, dont les hommes, incapables de résister à leurs pulsions, se servent sans vergogne. Pourtant elle est idéaliste, Jbara, mystique, et elle s'adresse constamment à Allah qui devient son ami, son confident silencieux. Où est sa liberté, et comment pourrait-elle résister à cette pression constante? Elle se sent coupable de céder aux hommes, de se prostituer afin de posséder un petit quelque chose, un toit et un lit, même miteux, mais qui vaut mieux que ce qu'elle a connu dans son village pouilleux. Louer une chambre pour une dizaine de fellations par mois lui parait le summum de la réussite. Pourtant, malgré cette existence sordide, Jbara garde une pureté d'âme extraordinaire. Paradoxal? Pas du tout, chacun sait que les plus belles fleurs naissent sur le fumier.

Après avoir connu la misère, la domesticité, la prostitution, après avoir été la favorite d'un cheikh puis trahie, après la prison, elle sera la jeune épouse d'un imam vieillissant. Devenue veuve, elle comprendra que son chemin vers Dieu a été sinueux, dur, difficile, mais à la fin elle conclura par les mots suivants "Allah, tu n'es que nuances et c'est pour ça que je t'aime."

Encore une fois, ce livre est une merveille d'intelligence, de finesse et de dessin. Bravo aux brillants auteurs de cette superbe adaptation, digne des plus grands.
récit factuel 4 étoiles

Un exemple de bd qu'il faudrait louer car elle aborde un sujet un poil tabou : comment Allah peut-il guider une fille toujours sur le fil de la prostitution.
Le dialogue de l'héroïne avec Allah se déroule en voix off tandis qu'on la suit dans ses tribulations plus ou moins classées X. Sujet certainement intéressant de savoir comment la foi s'accommode de ce labeur très particulier. Hélas, même si la dessinatrice compose de jolis tableaux aux couleurs chatoyantes, je trouve personnellement qu'on reste très étranger à ce dialogue avec Dieu. Les auteurs déroulent l'histoire de manière très factuelle et échouent à mon avis à la relever en y insufflant l'intériorité qui aurait fait ressentir quelque chose d'un peu transcendant au lecteur.
Certainement pas la meilleure adaptation de roman en bd que j'ai eue à lire.

B1p - - 51 ans - 5 septembre 2015