Maroc, 1900-1960 : Un certain regard
de Frédéric Mitterrand, Abdellah Taïa

critiqué par Tistou, le 3 juin 2015
( - 68 ans)


La note:  étoiles
Un certain regard
Ce livre est d’abord un livre de photos, photos provenant des Collections du Ministère des Affaires Etrangères, chacune commentée par Abdellah Taïa – pour le versant marocain - et Frédéric Mitterrand – pour le versant français. Couvrant la période 1900 – 1960, il s’agit évidemment de constater le passage de la colonie (Protectorat, qu’en termes élégants … !) à son statut de pays souverain (1956).
Même d’âges très différents ; 37 ans pour Taïa à la date de parution de cet ouvrage et 62 ans pour Mitterrand, il y a une espèce de connivence entre les deux, teintée évidemment des particularités qu’on imagine s’agissant de deux côtés aussi opposés de la barrière. Mais Frédéric Mitterrand laisse transparaître les années d’enfance enchantées qu’il y a connu quand Abdullah Taïa ne renie en rien ce que la culture française lui a apporté :

« J’ai dit oui à la proposition et j’ai commencé immédiatement à réfléchir au sujet. Plus exactement à chercher en moi, dans ma mémoire intime, dans mon destin, les traces de l’occupation française, les traces de sa présence au Maroc.
Je viens du peuple, d’une famille pauvre. Je parle pourtant le français, j’écris en français. J’ai passé des années à rêver de Paris, la Ville Lumière, le centre du monde pour moi, où, j’en étais sûr, j’allais vivre un jour. »

L’ouvrage est divisé en chapitres successifs, chronologiques :
- Le Maroc du Maréchal. Il s’agit de Lyautey bien sûr, qui reste une figure à part dans les relations entre les deux pays.
- Le Protectorat triomphant des bons sentiments et des belles affaires … Oui, l’œuvre « civilisatrice » n’était peut-être pas le but premier ! (on parle de colonisation)
- L’éveil. Principalement après la raclée qu’a prise la France en 40. La prise de conscience et les initiatives du Sultan Mohamed V. Les manœuvres du pouvoir français …
- Le retour. On parle bien sûr du retour de Mohamed V de l’exil malgache où l’avaient cantonné les autorités françaises. Et l’Indépendance …

Chaque photo est là pour illustrer un point et le commentaire des deux acolytes permet une vision « en 2D », en « stéréo », chacun pouvant apporter un contrepoint à l’autre.
Mais point de polémique au bilan. Un ouvrage sérieux mais agréable à consulter, qui plaira surtout à ceux que l’histoire du Maroc intéresse.