Le rebutant
de Dominique Sampiero

critiqué par Nathafi, le 11 mai 2015
(SAINT-SOUPLET - 57 ans)


La note:  étoiles
Hommage aux SDF
On en voit tant qu'on n'y fait plus attention. Leur aspect nous rebute, nous ne comprenons pas leur errance, leur vie sans but, leur quotidien sombre, leur solitude, leur marginalisation, la bouteille qui les accompagne, le tabac qu'ils roulent, leur main tendue... Tout comme leur refus de se laisser héberger, nourrir, soigner...

Avec ses mots, Dominique Sampiero nous présente "Le rebutant", un homme paumé qui a tout perdu, et l'accompagne au détour des rues. Il ressasse des souvenirs, quand il était enfant, ou sa famille d'accueil, un parcours difficile, déjà. Aussi son travail de maçon, puis sa femme, celle qui l'a trompé, et la bouteille qu'il n'a plus lâchée depuis, son licenciement pour alcoolisme. Une vie de m.... que l'auteur nous livre crûment au début de ce livre. Puis, au fil des pages, le ton se fait plus doux, la poésie prend le pas comme pour embellir cette douloureuse existence, cette vie saccagée, cette chute libre.

Dérangeant, "Le rebutant" ? Oui, il l'est. Pour tous.

"Par gourmandise, le rebutant dévisage les gens autour de lui et se repose parfois sur l'enveloppe physique d'un passant. Ses yeux ne parviennent plus à s'en détacher. Comme devant l'eau d'un fleuve au-dessus d'un pont.

Le néant en lui se gorge de l'image de l'autre, des rides de la souffrance, de la réussite, et implose doucement.

Personne ne sort indemne de ces étreintes.

Puis, pour se crever les yeux et guérir du regard qui l'évite, le rebutant marche droit devant, et s'il ne guérit pas, au moins, il avance, en boitant, à cause des vis sur son tibia, à reculons parfois, entre son corps et ce qu'il a oublié de son corps."

Un bel hommage aux "sans-abri", aux "sans-domicile-fixe", autrement dit aux clochards qu'on a renommés par pudeur, ou respect...