Un enfant à ma porte
de Ying Chen

critiqué par Libris québécis, le 17 février 2015
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Désir d'être mère
Contrairement aux auteurs migrants, Ying Chen ne choisit pas comme décor un quelconque créneau identifiable à une aire ethnique ou spatio-temporelle. Ses personnages mêmes répondent à une unique lettre de l’alphabet. Monsieur A. est ainsi le conjoint de l’héroïne de ce roman, qui, de L’Ingratitude à Querelle d’un squelette avec son double, poursuit son introspection afin de se définir selon quelque universel englobant tout l’univers féminin.

Un enfant à ma porte aborde la stérilité d’une femme désireuse de développer malgré tout son instinct maternel. Mais qu’est-ce qu’une mère ? Avec une lucidité peu commune, elle questionne ses sentiments à cet égard. Elle conclut de sa réflexion qu’elle ne peut échapper au sacre qui la couronnerait comme génitrice. Heureusement, elle découvre, par un beau matin, un enfant abandonné devant sa porte. Par le biais de l’adoption, elle compte prouver à son conjoint qu’elle est une femme complète, voire une mère parfaite. Si Monsieur A. conçoit sa paternité sous l’angle du pourvoyeur, sa conjointe, elle, réalise que la maternité s’examine sous des angles plus complexes.

Être mère, c’est un job à plein temps qui la gruge de l’intérieur. Comme La Vieille Dame indigne du film de René Allio, elle se doit d’envisager des mesures pour se protéger. Ce roman, à l’ère des pensions alimentaires, encourage la femme à transcender tout modèle culturel qui la dissoudrait comme un ver à soie. Bref, Ying Chen porte un dur coup au machisme.
L'échec de la maternité 8 étoiles

La narratrice anonyme de Ying Chen, celle que l'on suit depuis Immobile, rejetait dans les romans précédents de la série une maternité qu’elle considérait menaçante et inutile. Cette héritière d’un arbre généalogique vide qui erre d’une existence à l’autre sans jamais s'ancrer dans un quelconque présent ne croit pas, de toute façon, son corps apte à la reproduction.
Or, un matin, elle trouve un enfant assoupi devant chez elle et décide de l’adopter. Un enfant à ma porte est le récit de la faillite de la famille née de cette décision impulsive. De l’état végétatif dans lequel l’échec de sa maternité l’a plongée, la narratrice revient sur le passage de l’enfant dans sa vie.

Ipayette - - 34 ans - 18 février 2015