Philida
de André Brink

critiqué par Tanneguy, le 3 février 2015
(Paris - 85 ans)


La note:  étoiles
Esclavage en Afrique du Sud
Philida est une jeune esclave qui apprendra au cours du récit quelle est son origine ; elle est la "propriété" de Cornelius Brink, l'auteur apprendra au cours de ses recherches que c'est le frère d'un de ses lointains ancêtres ! L'histoire commence alors que Philida se trouve dans la ferme du vieux Brink producteur de vins, mais déjà proche de la faillite. Elle se fait "faire" quatre enfants par le fils de la famille alors que celui-ci doit épouser la fille d'une famille prestigieuse du Cap. La suite fourmille de rebondissements tous plus étonnants les uns que les autres.

L'auteur restitue l'histoire dramatique de l'Afrique du Sud au début du XIXème siècle juste avant que les esclaves soient affranchis. Il nous raconte des histoires horribles mais véridiques malheureusement. Cependant l'espoir demeure et beaucoup de poésie adoucit, un peu, le climat oppressant du roman. Et le pays est si attachant et l'on apprend beaucoup de choses, notamment sur les modes de vie de ces pionniers.

Ce n'est pas facile à lire d'autant que le texte fourmille de mots locaux qui ne nous sont pas familiers. Mais on est pris et on ne peut lâcher le livre ;
1 décembre 1834. 8 étoiles

1 décembre 1834.

Cette date est historique dans l'histoire de l'Afrique du Sud puisqu'il s'agit de la fin officielle de l'esclavage. Il restera bien du chemin à accomplir pour que l'air devienne un peu respirable dans ce bout de continent, ce bout du monde.
Dans un phrasé tout particulier, l'auteur nous invite du mauvais côté du fouet par les yeux d'une jeune esclave, Philida. Elle sera battue, aimée, vendue avec au loin la perspective de devenir enfin une femme libre.
Brink livre un texte brut avec un mélange d'expressions anglaises et néerlandaises, les dialogues sont peu ponctués, ce qui donne une lecture parfois déroutante. Mais il faut raison garder et se dire que les bonnes choses se méritent car il s'agit d'un livre grave et dur... un très bon roman.
J'ai suivi cette jeune femme avec admiration, elle qui ose et qui parvient à souffrir avec un curieux détachement. Courageuse Philida, tu étais si belle à garder la tête haute !

Monocle - tournai - 64 ans - 30 mai 2017


Un rappel nécessaire d'une négation de l'humanité ! 9 étoiles

Le grand intérêt de ce livre, il me semble, est bien le fait qu'il se situe juste avant la déclaration de l'abolition de l'esclavage , période charnière, et qui a dû être au combien difficile pour tous les protagonistes. Cet aspect ne sera néanmoins abordé que dans la dernière partie; les deux précédentes permettant réellement d’appréhender la situation d’un esclave dans ce début du XIXè siècle en Afrique du Sud. On ne peut s’empêcher de penser à cet Apartheid qui suivra...

C'est un livre étrange et curieusement construit. La première partie est d'un réalisme saisissant où plusieurs voix s’entremêlent. Personnellement elle m'a beaucoup marquée et je crois qu'il n'y a pas assez de mots pour décrire l'horreur que l'on ressent à la découverte de cette vie d'esclave et à la cruauté de ceux qui ont pratiqué ces méthodes défiant tout respect de la nature humaine. Certaines scènes sont assez difficilement supportables de par les violences envers les esclaves femmes particulièrement ; violences physiques (fouet et coups) et violences sexuelles (viols). On sait que l'auteur n'invente pas, qu'il s'est parfaitement renseigné d'autant que l'histoire de Philida est liée à sa propre famille. Ça fait froid dans le dos.

Ce qui est terrifiant c’est que tout ce monde Blanc dans toute sa splendeur sait tout à fait que les noirs sont des êtres humains comme eux, mais ils les avilissent pour mieux les exploiter à leurs propres profits.
Pour comprendre la réalité de cette abjection il fallait bien faire ressortir les ressentis et états d'âme des uns et des autres, bourreaux et victimes. Et même si cette première partie est déconcertante du fait de l'absence d'une véritable histoire linéaire, je l'ai trouvée extrêmement prenante. C'est la description d'une condition inhumaine et d'une ignominie , c'est pourquoi la deuxième partie arrive à point au moment de la mise aux enchères de Philida, la rebelle, celle qui aura osé porter plainte auprès d’un «protecteur des esclaves» pour promesse non tenue : l' affranchissement de sa condition d’esclave...

Plus agréable à lire grâce au récit que l'on sent plus romancé, cette deuxième partie se situe dans la période charnière où les esclaves entendent dire, espèrent sans y croire vraiment (une révolte d'esclaves précédente avait laissé un goût amer d'échec ; révolte menée par Galant, relatée entre autres dans le livre de Brink "Un turbulent silence") à la fin de la condition d'esclave.
Dans ce nouveau domaine avec ces nouveaux maîtres la vie semble plus paisible dans le sens où les violences physiques n’y sont plus pratiquées. Philida, qui se pose beaucoup de questions, ne semble plus cependant être seulement le centre de l’histoire, j’ai eu parfois le sentiment qu’elle était là pour «présenter» l’environnement humain, en particulier Labyn, l’homme qui l’accompagnera et la «formera» à l’idée que les esclaves peuvent un jour devenir libres et qui deviendra un guide et le père qu’elle n’a jamais eu. J’ai trouvé cette partie plus simple, comparée à la violence de la première. J’ai senti que l’auteur avançait prudemment dans l’histoire de Philida qu'il ne connaît pas forcément profondément, inventant, tout en essayant de respecter le plus possible la vérité de certains faits, afin de ne pas en faire une héroïne classique de roman ce qui aurait pu lui enlever de sa crédibilité.

La courte dernière partie, énigmatique, est touchante de par le désarroi dans lequel plonge Philida après la décision de l'abolition de l’esclavage et surtout par le fait qu’elle devient un être enfin libre, elle qui était née esclave ! Pas si facile que ça à concevoir cette "Liberté" !

Et même si une sorte de nouvel esclavage peut exister de nos jours de par l’exploitation d’individus, il est bien difficile de concevoir que des hommes ont pu croire qu’ils avaient le droit d’en asservir d’autres au point de les priver totalement de liberté , de les violenter physiquement et moralement et d’en faire commerce comme des marchandises ! Philida de André Brink nous le rappelle cruellement et dérange fortement une conception de l’Humanité dont on aurait tort de penser qu’elle ne soit plus en danger...

Pieronnelle - Dans le nord et le sud...Belgique/France - 76 ans - 19 avril 2017


Un autre monde 7 étoiles

Philida est une esclave noire d’Afrique du sud ; tricoteuse elle est aussi la maîtresse de Franz/François, fils du baas, dont elle vient d'avoir un quatrième enfant. Si leur relation semble sincère et amoureuse, il n'en reste pas moins que Franz doit épouser une blanche d'une autre propriété ; il faut obligatoirement séparer les jeunes gens en vendant Philida et ses enfants très loin de Zandvliet.
"Sauf que, aujourd'hui, je sais pour la première fois de ma vie que, même dans cet endroit, où je vis, c'est plus le mien comme j'avais toujours cru. J'ai plus ma place à moi, j'ai nulle part ma place . Ce qui m'arrive, ça sera toujours ce que les autres voudront qu'il m'arrive. Je suis un tricot tricoté par quelqu'un d'autre."
Philida décide donc de porter plainte contre Franz qui lui avait promis la liberté et des souliers.

Cette première partie est assez difficile. Le maître de la propriété est un homme cruel, ambitieux, les scènes sont dures, très violentes.
De plus, tous les mots du dialecte écrits en italique obligent à aller constamment aux 5 pages du glossaire, coupant la lecture.
S'ajoutent de nombreux passages pas forcément indispensables à l'histoire, comme des extraits de la Bible ou des contes africains, gênant aussi la fluidité du récit.

Attention SPOILER
Le départ de Zandvliet, marque un tournant dans le roman ; celui-ci se recentrant sur Philida ; esclave mais respectée dans une famille juste.
Elle voit arriver l'abolition de l'esclavage, même si chaque esclave doit encore servir son maître pendant encore 4 ans ; elle découvre la lecture, l'écriture, la religion, et enfin la liberté.
"Donc, on est le lundi 1 décembre 1834, le jour que tout le monde rêvait. Je trouve que ça valait la peine, en fin de compte. Maintenant, je sais vraiment comment on se sent, d'être libre."

Un avis partagé sur ce livre, dont le début a été assez pénible mais j'ai beaucoup aimé la seconde partie se recentrant sur le personnage de Philida ; les réflexions, les doutes, le questionnement d'une personne qui n'aurait pas dû réfléchir.
Une deuxième partie romancée beaucoup plus agréable, la première concernant le récit de l'auteur à partir de documents retrouvés (dont l'inventaire complet de la propriété)
Je regrette cependant le choix de l'auteur d'utiliser une écriture rudimentaire pour les chapitres de Philida.

Marvic - Normandie - 66 ans - 17 février 2017


Juste avant l’abolition de l’esclavage en Af. Sud 7 étoiles

« A partir d’un épisode de son histoire familiale » est-il écrit dans la quatrième de couverture. Bigre ! Ca ne remonte pas si loin cet épisode puisque l’abolition de l’esclavage en Afrique du Sud, territoire anglais à l’époque, remonte à 1833. L’histoire de Philida, elle, se déroule entre 1832 et 1833.
Philida est une jeune esclave, propriété de la famille Brink, au domaine viticole Zandvliet. Sa fonction principale est « tricoteuse ». Philida tricote bien. Elle tricote mais elle est esclave et a attiré l’attention de François Brink, le fils du maître du domaine. François Brink a sensiblement son âge, il l’a bien un peu forcée au début, lui faisant miroiter qu’il la ferait affranchir, à coucher avec lui, puis ça s’est passé plus naturellement, Philida, pleine d’espoir et naïve croyant que l’avenir serait forcément radieux. Coucher, coucher, il en restera toujours quelque chose ! En l’occurrence quatre enfants, tout de même ! Quatre enfants dont deux sont encore vivants. Tout ceci non officiel bien sûr.
Mais quand, en bonne partie pour sauver le domaine familial promis à la faillite, François Brink est réputé devoir épouser une jeune fille blanche de bonne famille, riche, du Cap, Philida comprend qu’elle a été abusée, qu’elle ne sera pas affranchie et que sa situation se complique notablement.
Décidée qu’elle est, elle quitte subrepticement le domaine auquel elle appartient pour aller porter plainte auprès du protecteur des esclaves (vous y croyez, vous à une fonction pareille ?! Apparemment ça existait.) Elle déclenche ce faisant un cataclysme puisqu’elle rend ipso facto en partie publiques ses relations avec le fils du maître, elle conteste l’autorité et surtout, elle pourrait faire capoter le mariage envisagé.
Il est bien entendu que le protecteur des esclaves ne protège pas grand-chose puisqu’il suffit à François Brink de venir affirmer que les allégations de Philida sont des mensonges pour qu’elle soit renvoyée vers ses maitres. Une procédure de mise en vente est engagée. Il faut se dépêcher, l’émancipation est en vue, et elle est vendue. Avec ses enfants.
Mais Philida ne lâche pas l’affaire et se montre des plus opiniâtres. C’est son histoire sur les deux ans qui précèdent l’émancipation qui nous est contée, entre drames, petites lâchetés, fulgurances d’héroïsme et de bonté.
L’esclavage … Et nos parents (lointains) y ont participé aussi ! Pas que ceux d’André Brink !

Tistou - - 68 ans - 4 février 2017


Long, beaucoup trop long 4 étoiles

J'ai enfin terminé ce roman auquel je n'ai pas accroché du tout même si l'histoire était très prometteuse.
Oui ça parle d'une période très dure de l'histoire, celle de l'esclavagisme, mais c'est mou, il y a beaucoup de répétitions et d'énumérations (et je ne parle pas de celle sur les biens de la maison des Brink qui fait pratiquement 3 pages !!!).
De plus, il faut régulièrement se reporter au glossaire en fin de livre pour pouvoir comprendre certains mots utilisés et j'ai horreur de ce genre de procédé, je trouve que ça coupe la lecture.
Encore une chose me gêne dans ce roman, c'est qu'il est quand même très tourné sur l'esclavagisme "sexuel" avec des descriptions qui n'étaient pas forcément nécessaires.
Je n'ai pas dû être sensible à la "poésie" de ce texte.

LesieG - CANTARON - 58 ans - 22 janvier 2017