Wild
de Cheryl Strayed

critiqué par Libris québécis, le 4 janvier 2015
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Un Compostelle à l'américaine
On connaît la route de Compostelle que plusieurs empruntent pour relever le défi de parcourir l’itinéraire ou pour des raisons existentielles, voire spirituelles. De nombreux films et romans ont abordé le sujet, certains avec plus ou moins de bonheur, d’autres avec humour comme le film Les Doigts croches de Ken Scott. Maryse Rouy a même écrit un polar, Au nom de Compostelle, se déroulant en 1240. Mais c’est au théâtre que j’ai le plus apprécié le traitement de la thématique par Hélène Robitaille avec Santiago, toponymie ancienne de Compostelle. (Cf. mon commentaire : http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/29385)

Cheryl Strayed s’est lancée elle aussi dans une aventure du genre. Les œuvres du créneau se penchent surtout sur les guérisons de l’âme. Son récit ne suit pas un pèlerinage qui mène à Compostelle. Pour renouer avec la paix de l’âme, l’héroïne, l’auteure de Wild, a choisi le Pacific Crest Trail, un sentier qui côtoie le Pacifique à partir du Mexique jusqu’au Canada. Avec un sac à dos de 70 k, elle s’engage, seule, pour un périple de 94 jours. Ce n’est pas le temps qui lui manquera pour remettre sa vie en question. Délaissant les drogues et une sexualité qui l’apparente aux nymphomanes, elle suit un sentier difficile. Désert au sud, neige au nord, elle vainc, non sans peine, les obstacles les plus pénibles, voire des cours d’eau infranchissables, des rencontres indésirables, des animaux peu hospitaliers, des pertes névralgiques comme ses bottines de marche. Il faut être téméraire pour entreprendre une telle odyssée. C’est l’Ulysse des temps modernes.

Abandonnera-t-elle son projet ? Le récit appuie sa dynamique sur ce suspense, qui ne poussera pas le lecteur à tourner les pages à toute vitesse. L’intérêt de l’œuvre est d’ordre humain. Cheryl parviendra-t-elle à faire d’elle-même un Alexandre le Grand qui a su trancher le nœud gordien ? Il faut une volonté de fer pour soigner ses maux et faire le deuil d’une mère morte prématurément d’un cancer. En fait, on assiste à une guérison que l’on peut comparer à une croissance personnelle sans la sentimentalité des œuvres qui abordent ce thème. Ceux qui ne savent lire entre les lignes s’ennuieront éperdument.

Le récit de l’auteure appuie constamment sa structure sur des analepses. Sur le sentier de la rédemption, elle revient sans cesse à la pensée positive de sa mère face à la vie. Jeune, elle se moquait de ses principes, mais son long itinéraire lui a permis de revisiter le creuset d’un enseignement jadis inefficace. Cette dualité nous transpose dans un amont et un aval qui se croisent avec bonheur dans des décors grandioses. Bref, je comprends pourquoi cette œuvre a intéressé Jean-Marc Vallée, un cinéaste québécois travaillant à Hollywood, qui a porté Wild à l’écran. Des Oscars à l’horizon.
Gros coup de coeur 10 étoiles

Ce récit est celui d'une rédemption, j'ai aimé suivre Cheryl Strayed à travers ses 1700 kilomètres de randonnée, car il n'y a pas seulement cette narration-là, mais aussi celle des années précédant la randonnée. On pleure à la mort de sa mère et l'on comprend très vite pourquoi la jeune femme s'est lancé ce défi. C'est un gros coup de coeur car la narratrice réussit le tour de force de nous décrire des paysages grandioses et parfois hostiles, alors que nous ne les avons jamais vus. C'est beau, c'est grand, c'est incroyable. J'ai adoré.

Flo29 - - 51 ans - 12 mars 2019