Race, nation, classe
de Étienne Balibar, Immanuel Wallerstein

critiqué par Alouette, le 10 décembre 2014
(Seine Saint Denis - 39 ans)


La note:  étoiles
Une analyse matérialiste du nationalisme et du racisme
L’ouvrage d’Étienne Balibar et Immanuel Wallerstein (Race, nation, classe. Les identités ambiguës, éd. La Découverte – coll. Poche, 1997) est la publicisation d’un séminaire qu’ils ont conjointement animé pendant 3 années, entre 1985 et 1987, à la Maison de Sciences de l’Homme de Paris. L’ouvrage consiste en un dialogue entre le philosophe français et l’historien et sociologue étasunien sur la modernité du phénomène raciste et ses implications avec le capitalisme contemporain. Les auteurs soutiennent que le racisme ne se réduit pas à une attitude, mais est le produit historique de la division sociale du travail, de la division du monde en centre et périphérie, et de la structure de l’État-nation établie lors de l’avènement de l’économie capitaliste. Les deux positions sont parfois en opposition, mais elles s’accordent avec l’idée que la seule façon d’analyser la situation actuelle est d’adopter une perspective historique afin de saisir les contradictions actuelles de la structure globalisée du monde. Wallerstein soutient que les causes du racisme remontent à l’accumulation capitaliste, à la division du travail en un centre et une périphérie, et à la distinction entre l’homme qui travaille et la femme qui reste dans le foyer domestique. De son côté, Balibar trace un parallélisme entre le racisme et le nationalisme afin d’affirmer qu’il s’agit d’un phénomène transnational. Inspiré par l’anthropologue Marcel Mauss, il décrit à juste titre le racisme comme un « phénomène social total » qui s’inscrit dans des pratiques et dans des discours ségrégationnistes (dont une des formes institutionnalisées les plus connues demeure le régime de ségrégation établi dans le sud des États-Unis après l’interdiction de l’esclavage en 1865, et aboli seulement en 1954). L’ensemble de ces pratiques, discours et représentations, permet de comprendre la formation d’une communauté raciste.