Le portrait craché de mon père
de Jean-Sébastien Huot

critiqué par Libris québécis, le 21 novembre 2014
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Père castrateur
L'image du père abonde dans la littérature québécoise. On a plutôt tendance à faire de lui un être faible ou castrateur. Celui de Jean-Sébastien Huot ne fait pas exception. Le contexte défavorable dans lequel il a vécu l'empêche d'établir une filiation dont il tirerait une certaine fierté.

Il est devenu un cliché d'affirmer que ce sont les enfants qui paient la note de l'échec d'un couple. Les signes avant-coureurs de l'explosion de la cellule familiale produisent souvent de la violence physique et, invariablement, verbale. Ces agressions contre la personne détruisent l'estime de soi. Pour la recouvrir, il reste le psy, l'écriture, l'amour et le travail. Voilà le contenu que l'auteur a articulé pour raconter sa résurrection. Cet aboutissement heureux survient à la suite d'un cheminement entrepris pour faire le vide d'un père halluciné qui l'a privé de son « je ». Un moi crispé devant l'écran de son ordinateur à qui il aimerait bien confier sa souffrance pour l'apprivoiser. C'est grâce à l'amour qu'il parvient finalement à une écriture de combat, prémices à sa délivrance.

Jean-Sébastien Huot réussit très bien à communiquer son état d'âme, semblable à celui d'André Gide quand il a écrit : « Famille, je vous hais. » Ce récit d'une enfance tordue s'inscrit dans une forme littéraire qui fait fi des lois du genre. C'est de la prose poétique qui évoque une enfance dont on ne se vante pas dans les réunions de famille. La violence subie par l'auteur se reflète dans son écriture. Elle exprime bien la révolte d'un jeune, maudissant celui qui lui a rendu la vie insupportable. Bref, Freud aimerait cette mort symbolique du père pour que le fils ne devienne pas un être manqué.