La mémoire du vautour
de Fabrice Colin

critiqué par Belial, le 16 octobre 2014
(Anvers - 45 ans)


La note:  étoiles
dis toi qu'il est tellement plus mieux d'éradiquer les tentacules de la déréliction... et tout deviendra clair
Avec la Mémoire du vautour, et après Kathleen, voire Or Not to Be, Fabrice Colin entérinait définitivement sa conversion des littératures de l’imaginaire à la littérature blanche et signait au passage son premier roman chez Au Diable Vauvert. Parler de la Mémoire du vautour n’est pas chose aisée, déjà parce que le bouquin n’est pas vraiment résumable.

Essayons quand même : William Tyron, après un accident de voiture sur le Golden Bridge de San Francisco, se laisse vivre en sautant d’un petit boulot à un autre. Aussi, quand une mystérieuse société lui propose un bon salaire pour une tâche a priori facile : tenir compagnie à une ancienne GI gravement malade en évitant de lui remémorer certains épisodes traumatisant de sa carrière militaire, il n’hésite pas. Et nous voilà à suivre le délitement du corps et de la vie de Sarah Greaves, qui embraye comme narrateur. Et puis le récit bascule à nouveau, d’autres histoires sont contées, de personnages et situations tous reliés d’une manière ou d’une autre aux protagonistes des premiers chapitres.

Alors quel est le sens de tout ça ? Qu’est-ce qui relie ces récits et fait l’identité profonde du roman ? Des interrogations sur la mémoire et la mort sans aucun doute, mais qu’est-ce qui sous-tend réellement l’œuvre ? Je cherche toujours. On comprend très bien que l’ombre de David Lynch (cité sur le quatrième de couverture) plane, il y a du Lost Highway dans tout ça. Mais qu’est-ce que ça produit sur le lecteur ? Sur moi pas grand-chose en tout cas.

Pour autant tout n’est pas à jeter. Le style de Colin est toujours évocateur et maîtrisé à la perfection : le cru y côtoie le léger, le doux et le beau. Ces quelques histoires ont toutes quelque chose de marquant, de sensible et d’indéniablement intéressant, poignant parfois. Pour autant voilà un roman particulièrement hermétique, où le lecteur se perd assez vite et ne parvient pas à atteindre un niveau de compréhension satisfaisant. Mais c’est le lot de tous les expérimentateurs, dont Colin fait partie, de ne pas faire mouche à chaque fois.