Textes pour la gisante
de Françoise Houdart

critiqué par Bluewitch, le 4 novembre 2003
(Charleroi - 45 ans)


La note:  étoiles
Libres voix
Textes pour la gisante, textes pour la morte, textes pour l'aimée, textes pour la désirée, textes pour la « femme ». Quand la poésie se fait roman, quand le roman se fait poésie. Il faut le respect des mots pour écrire un tel livre, l’amour des mots, l’amour de l'âme.
Seize voix pour parler à celles qui ne sont plus là, aux englouties, aux silencieuses. Voix de la mort, voix de la soeur, voix de la fille, voix de la caresse, voix de l'amant. Pour dire ce qui jamais ne fut dit avant.
Avant la déchirure, avant la disparition, la séparation. Parler à « elle ».
« Ces paroles, en ce lieu, que tu voulais consécration, ma triste compagne ; ce serment que tu attendais, je le connaissais comme ton chant d’extase. J’en avais tracé chaque lettre dans le vif de mon âme. Ce serment, mille fois répété dans le désir de toi, il se tétanisait dans le sas de ma gorge, dans la crispation de ma bouche, dans l'urgence de le dire. Dans mon irréparable silence. Celui où tu gis à présent, si loin de là-bas ; ton imbrisable silence.
Ne l’avais-tu pas compris ? En silence, je t’épousais.
Le sauras-tu jamais ?
En ton silence, mon amie, mon précieux amour, en ton impénétrable, ton implacable silence, aujourd'hui, je t'épouse… »
Paroles pour celle au corps de marbre, à la dépossédée, à l’usurpée, à la veillée. A celle qui vit la Métamorphose. Qui traverse la rivière.
Dire ce qui est inexprimable, incontinu, qui déborde de soi et du cœur. C’est rendre grâce à celle qui part, celle dont le corps fut le fruit d’une caresse, l'enfant d’une douleur, la consomption d’une flamme.
C’est laisser vie à l’espoir et à l’écoute. Ces textes respirent la maturité et la conscience. Ils sont impressionnants, bouleversants, et on se prend, dans l'intimité de la lecture, à leur laisser la place, prendre corps et à libérer les mots à haute voix, comme s’ils avaient besoin, eux aussi, de briser la barrière de ce Silence.
Chapeau! 10 étoiles

Chapeau bas au duo féminin révélé (confirmé) par la critique de Bluewitch : les mots de Françoise font mouche, une nouvelle fois. Et ceux de Bluewitch vibrent à l'unisson. Et font vibrer en nous ce je ne sais quoi qui tremble lorsque l'on touche à l'indicible. Briser la barrière du Silence, écrit Bluewitch. Puis, à petits pas, s'éloigner vers l'inconnu, et attendre. Doigt sur la bouche. Silence... Silence...

Lucien - - 69 ans - 4 novembre 2003