Le monde comme il me parle
de Olivier de Kersauson

critiqué par Veneziano, le 9 août 2014
(Paris - 46 ans)


La note:  étoiles
Une vie en multicoques
Olivier de Kersauson jette l'ancre et pose les amarres : il en profite pour jeter un bilan rapide sur sa carrière et les raisons de sa passion pour la mer. Le navigateur fait court, et l'explication est donnée, de manière fortement intuitive : la mer, école de la vie, apprend à ne compter que sur soi, ce qu'il apprécie chez les Polynésiens, la solitude permet seule d'apprécier le sens de la vie. Cette indifférence, philosophie autant que mode de vie, lui a été reprochée. Il a besoin de distances autour de lui pour exister, les longs discours ne sont pas utiles.

Le message est aussi synthétique que fort. La lectrice et le lecteur comprennent l'élément constitutif central qui façonne un navigateur. Il est dommage cependant que ce témoignage, d'importance, aille à l'essentiel au point de rester en surface, si je puis me permettre, et de surcroît avec un style oral, assez souvent bâclé, alors qu'il lui arrive de très bien s'exprimer. Une impression de bâclé et de vite écrit m'a mis mal à l'aise. Il donne l'impression de ne pas vouloir trop en dire, car ça le regarde et que la paresse le guette. C'est sans doute la rude vie de l'animal sauvage.

Ce livre reste intéressant, même important sur l'essentiel d'une réalité, d'un mode de vie, mais demeure, à mon goût, un peu trop superficiel.
Un homme libre et solitaire 8 étoiles

Equipier puis second d’Eric Tabarly sur plusieurs de ses Pen-Duick dans les années 60/70, Olivier de Kersauson est devenu ensuite capitaine sur ses propres bateaux, les ketchs Kriter II puis Kriter IV (1978) avec lequel il participe à sa première Course du rhum en solitaire. Il enchainera ensuite les courses au large, les tours du monde en solitaire et les records jusqu’en 2007/2008. Il arrête la course en mer alors qu’il est âgé de 64 ans. Il reconnaît humblement que de toutes ces années, ce qu’il a appris peut tenir sur une seule feuille de papier (et encore sur le seul recto). Après avoir été un temps chroniqueur ou plutôt participant à la télévision, il se reconvertit dans la littérature. Dans ce livre, il nous livre ses idées sur le monde, la vie, son rapport à la mer et aux autres.
« Le monde comme il me parle » est un compilation de diverses idées ou considérations personnelles à l’auteur. Il reconnaît aimer la solitude, toujours chercher à ne pas communiquer avec autrui de peur de donner des verges pour se faire battre. Il préfère l’agir au parler, se complait dans la solitude et se plait à séjourner dans le Pacifique, du côté de Tahiti plutôt que de celui de Limoges ou de Romorantin. L’ouvrage est court (150 pages), facile à lire, mais ne va pas très loin dans les confidences. Kersauson reste pudique et passionné. Il se déclare à la fois solitaire silencieux et janséniste « déconneur ». Un personnage sympathique bien qu’un tantinet égotiste qui nous propose « une formidable ode à la mer et à la vie » dixit la quatrième de couverture. Nous y mettrons juste un petit bémol : la « philosophie » de Kersauson est quand même assez proche des brèves de comptoir… À lire quand même pour quelques petits éclairs de sagsse ou perles de lucidité, semés ici ou là.

CC.RIDER - - 66 ans - 25 octobre 2024