Nom de dieu !
de Philippe Grimbert

critiqué par CHALOT, le 12 mai 2014
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
HUMOUR ET REFLEXION
« Non de dieu »
Roman de Philippe Grimbert
éditions Grasset
193 pages
Avril 2014

Une colère bien humaine

Baptiste a tout pour être heureux : une reconnaissance professionnelle, une femme aimante et deux filles qu’il adore…Tout ou presque.
En dehors de son travail, il a sa foi et son engagement autour des œuvres caritatives de l’église.
Il en oublie un peu et même beaucoup sa famille en dehors des questions matérielles.
Il a sa croyance, forte, très forte, le conduisant à faire des prières avant chaque repas et à conduire avec une croix accrochée au rétroviseur intérieur.
Comme tout engagement entier, excessif, il peut se poursuivre sans accroche ou amener la catastrophe ….
Mais voici que des ennuis sérieux, de vraies catastrophes s’abattent sur ce brave homme : la perte de son emploi d’abord, une femme qui s’éloigne, des filles qui ne le comprennent plus et Dieu qui l’abandonne.
C’est beaucoup, trop pour ce brave homme qui disjoncte comme le diraient certains, ou qui voit le ciel s’abattre sur sa tête comme l’expliqueraient d’autres.
A-t-il perdu la foi, sa raison d’être ?
Non ! pas du tout puisqu’il décide de régler publiquement ses comptes avec le Créateur.
Avec méthode il dresse un réquisitoire implacable contre le « Tout Puissant » n’hésitant pas à s’appuyer sur les Technologies de l’Information et de la Communication et aussi sur la bonne vieille méthode de l’imprécation orale devant Notre Dame de Paris :
« L’actualité qui trônait à la une et éclaboussait de sang l’écran de son ordinateur alimentait sa colère, morbide comptabilité qui instruisait un peu plus chaque jour le dossier à charge du Créateur. »
Qui va gagner ?
Ce n’est qu’un conte où l’humour est plaisant, ce qui ne nous empêche pas de réfléchir au sens de la vie et au système destructeur, que l’on soit croyant ou athée.
Jean-François Chalot
Crise de foi... 3 étoiles

Si l’on se réfère à «Un Secret», un ouvrage du même auteur, en grande partie autobiographique, qui, en son temps, avait remporté un succès bien mérité et justifié une adaptation au cinéma, elle aussi très réussie, la famille de Philippe Grimbert est d’origine juive.

Cette appartenance suffit-elle à expliquer l’argumentaire de «Nom de dieu» -sans majuscule pour ceux qui n’y croient pas- à savoir le silence de Dieu devant la souffrance humaine et, surtout, l’injustice des épreuves infligées aux innocents, indépendamment de leur conduite, aussi irréprochable soit-elle ?

En tout cas, l’humour plutôt grinçant que l’auteur est censé ici manifester tombe souvent à plat, tant ce type de dérision n’est guère payant et sont assez lourdes les allusions à certaines personnalités du Landernau religieux : Frédéric Leblanc, le Cardinal Vingt Quatre ou le Père Louis Guilbert : on aura bien sûr reconnu ici le fondateur du «Monde des Religions» comme celui que l’on appelle «le prêtre des loubards». Quant au Cardinal…

De là à penser que Philippe Grimbert avait en écrivant ce livre très caricatural un compte à régler avec les excès et erreurs du catholicisme… Ne fait-il pas glisser subrepticement cette parole à l’un de ses personnages à propos de Pie XII qui aurait permis ici la guérison mystérieuse d’une certaine Sidonie :«Pour elle, au moins, il aura fait quelque chose…» Sans commentaire !

L’énigme du Mal, comme la mort d’un enfant, l’horreur d’Auschwitz ou le tsunami indonésien, évoqués également dans «Nom de dieu» méritait sûrement un autre traitement, même si la révolte de son héros peut aisément se comprendre ; c’est d’ailleurs tout l’art d’écouter les misères de «l’autre», pratiqué au quotidien par Philippe Grimbert, également psychanalyste de son métier, ne l’oublions pas.

On peut lire p 133, à propos de la catastrophe de 2004 «Alors Toi si fort, Toi le Tout Puissant, qui as été capable d’ouvrir la mer pour laisser passer Moïse et les siens, peux-tu me dire pourquoi diable Tu l’as refermée sur ces malheureux Asiatiques ? Quel crime avaient-ils commis ?». En écrivant cela, l’auteur fait bien sûr référence au passage de «l’Exode» de l’Ancien Testament, ainsi qu’indirectement, peut-être au «Livre de Job» ; mais, au moins ce dernier, après s’être, lui aussi, révolté dans un premier temps, comprend-il à la fin que si le mal et la souffrance existent, ils frappent aussi bien les bons et les méchants, sans qu’il soit question d’une punition, divine ou pas.

Pour toutes ces raisons, «Nom de dieu» ne parvient pas à susciter chez le lecteur la moindre empathie pour ce «pauvre» Baptiste Théaux, alias Théo (tiens, tiens !) ; il ne le fait pas davantage rire (juste sourire, parfois) face à des péripéties aussi invraisemblables. Dommage, car si la légèreté du style est toujours présente, Philippe Grimbert nous avait habitués à une approche psychologique infiniment plus subtile.

Isis - Chaville - 79 ans - 2 janvier 2015


Une femme honnête n'a pas de plaisir ! 4 étoiles

Monsieur fait le bien et madame s'ennuie.
J'ai repensé au film "Un long fleuve tranquille" et à la chanson de Jean Ferrat "Une femme honnête".
Toutefois l'humour de Grimbert ne m'a pas fait vibrer. J'ai trouvé ses clichés répétitifs et tellement "gros" qu'ils en perdaient leur sens.
Donc bilan en demi teinte pour celui qui avait atteint des sommets avec le garçon singulier et le secret.
La subtilité lui réussit mieux que les idées toutes faites du genre :"si Dieu existe pourquoi laisse-t-il faire le malheur".
Dommage !

Monocle - tournai - 64 ans - 29 décembre 2014


Guignolesque ! 8 étoiles

Baptiste est un fervent chrétien ! Trop fervent ! Il distribue des soupes populaires, fait le clown à la clinique pour les enfants malades… et en oublie sa famille. Sa femme voit un psy et est en train de perdre la foi - que ce soit en Dieu ou en son couple. Pendant ce temps, Baptiste est chargé de licencier des employés dans son usine de friandises et lorsqu’il a bien achevé cet ingrat boulot, enrobé de bondieuseries et de lâcheté hypocrite, il est licencié à son tour. Dans le même temps, il est remercié de son bénévolat. Alors quand sa femme le met à la porte, il pète un câble et se met à haranguer Dieu sur le parvis de Notre-Dame, juché sur une caisse en bois et affublé de son déguisement de clown. Sans relâche, il accuse Dieu et le somme de se manifester, car il n’a pas mérité ça tout de même !
L’histoire tourne en eau de boudin à la fin et part complètement en sucette (ha, ha) !
L’auteur semble s’être amusé à nous divertir aux dépens de son personnage. On l’imagine aisément écrivant son conte le sourire aux lèvres.
Ce livre est très vite lu, divertissant.

Pascale Ew. - - 57 ans - 16 juillet 2014