Les enfants de Doodletown
de Annie Dufour

critiqué par Libris québécis, le 3 mai 2014
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Un réseau d'adoptions illégales
Doodletown est situé dans l'état de New York. Ce village fictif fut déserté dans les années 1930 quand les mines cessèrent leurs activités. En 1970, quelques-uns voulurent le ressusciter en faisant appel à des familles dont les ancêtres y avaient vécu. Certaines acceptèrent l'invitation, surtout pour échapper à la Justice ou à cause de leur situation financière boiteuse. Cette nouvelle population vit en vase clos dans l'espoir d'être oubliée de ses créanciers ou des policiers. Un pasteur, un médecin et quelques marchands offrent les services d'usage à une cinquantaine de personnes qui ont intérêt à se couper du monde. Ils vivent en se privant du confort de la société états-unienne, à l'instar des communautés qui s'isolent pour des raisons religieuses.

C'est le cadre dans lequel se tisse la trame de ce polar. L'intérêt est suscité par la mort mystérieuse des enfants du village. Ils passent de vie à trépas sans qu'un symptôme quelconque en sonne l'alerte. Un personnage anonyme met la puce à l'oreille d'un détective privé en lui envoyant par la poste des documents susceptibles d'éveiller sa curiosité. Avec son ami Nicolas Lajoie, les deux hommes parviennent en 24 heures à solutionner l'énigme, comme à l'époque classique qui imposait une unité de temps et de lieu. Aujourd'hui cette vitesse vertigineuse détruit toute crédibilité. Il en résulte des raccourcis qui débouchent sur des invraisemblances. Une enquête policière ne se mène pas en un si court laps de temps pour mettre à jour un réseau d'adoptions illégales. Les morts infantiles ne sont en fait que simulacres. Sous l'effet de substances causant le coma, les enfants sont expédiés à des riches sans scrupules, qui contournent les longues procédures que doivent suivre les éventuels parents adoptifs.

L'auteure a réuni tous les éléments pour traiter avec brio d'un sujet négligé de la littérature. Malheureusement, elle ne les a que survolés au profit d'un suspense mécanique, créé par le morcellement de la narration en petites unités qui affichent le déroulement du temps en cette journée d'enquête. La matière rassemblée méritait une exploitation beaucoup plus longue que cette ébauche mal écrite. Pourtant ce roman aurait pu ressembler à De Beaux Lendemains de Russell Banks.