Poitiers. 19 septembre 1356
de Georges Minois

critiqué par Saint Jean-Baptiste, le 5 avril 2014
(Ottignies - 88 ans)


La note:  étoiles
Le Moyen-Âge n'en finira jamais de nous étonner !
Le livre de Georges Minois nous raconte un des épisodes les plus tragiques de la guerre de Cent Ans, la guerre de Poitiers - 1356. Il nous présente d'abord les personnages en présence : le Roi de France d'un côté, et le Prince Noir fils du Roi d'Angleterre, de l'autre. Il nous explique ensuite les causes et les enjeux de la guerre. Il nous raconte ce qu'étaient les armées au milieu du XIVème siècle. Il nous raconte encore comment s'est déroulée cette bataille et, finalement, ses terribles conséquences pour la France.

Disons-le d'emblée, c'est tout à fait passionnant ; même si, de temps en temps, les premiers chapitres m'ont paru un peu surchargés de détails qui ne sont pas toujours indispensables. Par exemple, faut-il toujours énumérer tous les personnages qui accompagnent le Roi de France dans ses péripéties : il y a parfois une demi-page de noms de seigneurs, qui à mon avis, encombrent inutilement le récit.

Au chapitre suivant, quand Georges Minois nous raconte la bataille, il nous porte au comble de l'étonnement ! Il passe souvent la plume à des chroniqueurs de l'époque et surtout à ce merveilleux Jean Froissart qui déborde d'enthousiasme devant cette « très cruelle, très fière, très merveilleuse et périlleuse bataille ». Par moment on croirait qu'il nous raconte une partie de sport : le tout jeune duc d’Alençon, c'est son premier match, heu ! pardon, sa première bataille, a coupé trois têtes d'Anglais d'un seul coup d'épée... ! Ah la belle phase de jeu ! Le comte Richard de la Vachée est tombé de son cheval mais, il s'est redressé et a lancé son épée au travers de l'Anglais qui l'avait fait tomber et l'a coupé en deux ! "Ah ! Le beau tumulte, fier et cruel, avec si beaux coups de hache et d'épée", s'écrie Froissart émerveillé !

Le Moyen-Âge n'en finira jamais de nous étonner !

Pourtant, le grand sport, n'est pas de tuer mais de faire des prisonniers. Les prisonniers sont laissés en liberté contre leur parole de payer une rançon, qui sera proportionnelle à leur rang et à leur bravoure. Parfois, honneur oblige, les prisonniers continuent la bataille avec un bâton, comme si la guerre était un jeu !
Il semble que la loyauté ait été la vertu première du Moyen-Âge, du moins dans la Chevalerie : la rançon est toujours payée parce qu'on a donné sa parole.

Mais bientôt, après cinq heures d'une merveilleuse bataille, le Roi de France est fait prisonnier. Il a tout fait pour mourir au combat mais ça n'a pas marché. On l'amène à « son cher cousin », le Prince de Galle, qui s'excuse : c'est Dieu qui l'a voulu, mon doux seigneur, je n'y suis pour rien, je suis désolé ! (parfois l'auteur se demande si ce n'est pas de l'humour anglais tellement c'est énorme).

Mais pour la France, c'est une catastrophe : pour sa libération, le Roi est disposé à céder la moitié de son royaume au Roi d'Angleterre.

On arrive alors à la partie la plus intéressante du livre : les conséquences de la défaite pour la France. Les États généraux ont été convoqués, avec à sa tête Étienne Marcel qui se déclare Président de la République parisienne ! Entre parenthèses, on peut se demander si Étienne Marcel a bien mérité d'avoir sa statue à Paris, lui qui a porté les armes contre son Roi et contre sa patrie.
Et puis, il y a les revendications du Roi de Navarre, Charles le Mauvais qui a joué un rôle déterminant dans la guerre de Cent Ans et que, pour ma part, j'ignorais complètement. Et puis il y a encore la « merdaille » : tous les rebelles et les mercenaires de tous les pays, qui se sont fait tuer comme par plaisir... On devra peut-être recommencer une guerre pour savoir qui va les enterrer ! On apprend beaucoup de choses dans cette partie du livre, qui est, à mon avis, la plus passionnante.

Dans l'ensemble, que voilà un livre instructif et intéressant ! Même si par moment on a l'impression que l'auteur en dit trop ou pas assez : trop, au début, avant la bataille, et pas assez sur la suite des événements.
Mais, après tout, c'est peut-être voulu : ce sera une incitation à lire La Guerre de Cent Ans, écrit par le même auteur, et qui, paraît-il, est une référence en la matière.