Le charretier de la mort et autres nouvelles fantastiques
de Selma Lagerlöf

critiqué par Fanou03, le 31 mars 2014
(* - 48 ans)


La note:  étoiles
mysticisme chrétien et légendes nordiques
La rédemption et la mort, ce sont les deux thématiques essentielles abordées dans ce recueil de nouvelles assez sombres. Le charretier de la mort, qui en forme l’ossature, tant par la longueur que par le contenu, y côtoie sept autres récits imprégnés à la fois par le mysticisme chrétien et par les légendes nordiques.

En mettant en scène des personnages en proie au péché (comme l’ivrognerie et la paresse dans "Le Charretier de la mort", l’orgueil dans "Le joueur de violon") ou bien des héros incarnant la foi chrétienne et faisant face au mal (la généreuse Lucia face à une Madame Rangela pétrie d’avarice dans "Légende de la Sainte-Lucie"), Selma Lagerlöf illustre la puissance de la foi, malgré un prix à payer parfois bien lourd pour accéder à la rédemption (des épreuves douloureuses pour David Holm dans "Le Charretier de la mort", la mort pour le commandant Silfverbrandt dans le "Tomte de Toreby"). La mort se révèle en effet omniprésente dans le recueil. Si la figure fantomatique de l’inquiétant Charretier en est l’allégorie la plus frappante, on la retrouve aussi dans d'autres nouvelles pleines d’intériorité, comme "La Vieille Agneta" ou "Le chemin entre ciel et terre", récit mélancolique d’un homme se sachant condamné au Grand Départ.

Dans ces écrits intimement liés à la Scandinavie, l’auteure fait appel largement aux mythes et aux légendes de cette région pour nourrir son imagination. À ce titre on croise donc régulièrement des figures plus ou moins connues du bestiaire nordique : un Tomte (sévère et intraitable dans le" Tomte de Toreby"), des géants, un neck... Ces figures, éminemment païennes, se retrouvent d’ailleurs dans une position nuancée vis-à-vis de la foi chrétienne, plutôt d’ailleurs en tant qu’alliées, à l’exception notable des géants et autres ondines dans "Sigrid la Superbe" où la reine Sigrid personnifie clairement la lutte sans espoir du paganisme contre la christianisation victorieuse.

Les nouvelles, en général courtes, sont parfois très proches des contes dans leur traitement et leur style, mais se révèlent globalement pessimistes et d’une certaine noirceur, en montrant une humanité fragile, ballottée par le mal et les forces de la nature. Cependant, malgré l’intérêt que j’ai pu y trouver, je ne peux pas dire que j’ai pris beaucoup de plaisir à la lecture de ce recueil. L’écriture, élégante mais parfois un peu sèche, manque de rythme à mon goût. Quant à la morale chrétienne, qui baigne une grosse partie des textes du recueil, elle s’avère un peu pesante et bien démonstrative par moment.