Nous sommes le 11 novembre 1918. L'armistice a été signé, et prendra effet à 11 heures du matin. Mais cette nouvelle, Will, jeune recrue de 16 ans de l'armée britannique, l'ignore complètement, et quand une petite unité menée par son frère se rend dans la forêt près de la frontière belge pour y débusquer des Allemands, il se porte volontaire pour en faire partie.
Axel a 16 ans lui aussi, jeune recrue de l'armée Allemande, qui vient tout juste de débarquer sur le front dans un train rempli de gamins aussi jeunes que lui.
Eddie, lui, est un peu plus âgé. Du haut de ses 18 ans, cet Américain d'origine germanique est un aviateur qui a déjà abattu 4 avions ennemis. Encore un, et c'est le tableau d'honneur. Aussi quand l'annonce de l'armistice lui parvient, il fait décoller son avion illico presto et part en chasse de l'avion allemand qui lui permettra d'avoir sa photo dans le journal.
11 novembre retrace les dernières heures de la première guerre mondiale au travers de l'histoire et de la rencontre de trois jeunes gens d'origine différente.
La première moitié du livre inscrit les personnages principaux dans l'histoire, au travers de leur propre histoire. Si j'ai trouvé cette partie du livre lente à se mettre en place, j'ai apprécié le fait que l'auteur présente chacun des personnages en forçant un peu le trait sur ce qu'ils ont de commun, et non ce qui les différencie. Déjà, tous les trois sont atrocement jeunes pour faire la guerre. On connait tous des gamins de 16 / 18 ans, des neveux, des cousins des enfants. Essayez un peu d'imaginer un sergent instructeur leur expliquer comment plonger la baïonnette dans le ventre de l'ennemi pour faire le plus de dégâts possibles (oui, c'est atroce). Ils ont tous les 3 une famille avec laquelle ils s'entendent bien, des parents aimants et aimés. Ils ont perdu au moins un être cher dans cette guerre. Ils ont souffert des restrictions et de la faim, dans leur pays. Et puis ils se sont engagés, ils ont été formés. Une jeune fille occupe leurs pensées pendant qu'ils souffrent du froid. Tous les trois ont peur. Bref, ce sont 3 gamins, de bons gosses, qui portent l'uniforme et sont dans un camp parce qu'ils sont nés à un endroit ; mais on imagine bien que s'ils étaient nés ailleurs, leur uniforme serait d'une autre couleur, et puis c'est tout.
La seconde moitié du livre raconte comment Eddie et Axel se rencontrent, bientôt rejoints par Will, comment ils vont se sortir d'une situation tragique, et se "reconnaitre" dans l'autre, étant attendu qu'à présent tous les 3 savent que la guerre vit ses dernières heures (ce qui ne l'empêche pas d'emporter son content de morts). Cette seconde partie est plus vivante, présente plus de suspense et d'actions que la première.
Globalement, et bien que ce livre soit étiqueté "jeunesse", j'ai trouvé qu'il manquait de relief. Tout est trop lisse, l'histoire, le caractère des personnages, la rencontre improbable, la loyauté des nouveaux compagnons. L'écriture, simple et fluide, reste dans le descriptif, peinant à émouvoir le lecteur, sauf peut-être dans les derniers chapitres où tout s'accélère. Doswell aurait pu exploiter tout un tas d'éléments pour faire vibrer son lecteur. Par exemple, l'armistice signé à 2 heures du matin sera effectif à 11 heures pour rester dans la série des 11…, et jusque-là, les armées sont invitées à continuer à se battre. Peut-on faire plus bête et plus injuste (oui, on peut, mais là n'est pas la question) ? Voilà une carte qu'aurait pu jouer l'auteur. Les personnages secondaires sont stéréotypés à outrance, les situations également, et l'ensemble donne un livre un peu trop politiquement correct à mon gout.
Ceci dit, le rendu de la "guerre" en elle-même, personnage à part entière, qui fauche au hasard, qui mutile ou qui tue, aveuglément, à retardement ou par surprise, ses mille visages, ses mille pièges, est sacrément réaliste. On sent bien que c'est cet ennemi sans visage que Doswell dénonce.
Au final, mon avis est plutôt mitigé sur cet ouvrage qui manque un peu de souffle et de relief. Quand elles seront en âge, j'emmènerai mes filles sur les côtes normandes, leur expliquer ce qu'est la guerre (je sais, ce n'est pas la même guerre, mais c'est toujours la même horreur). Il y a à Colleville-sur-mer une jolie promenade, qui longe d'une part une des "plages du débarquement", et de l'autre, le cimetière américain ; d'une part, des falaises défigurées par les éclats d'obus au-dessus de la mer grise, et de l'autre, des champs ; des champs de croix, à perte de vue, en souvenir de ceux qui, à 16 ou à 18 ans, sont tombés là. Et ça, ça ne manque pas de relief !
Eddie avait déjà vu des cadavres, certains réduits en cendres, d'autres si atrocement mutilés qu'ils en étaient méconnaissables. […] Le type qu'il avait abattu aurait pu appartenir à son cercle intime. Si les familles de ses parents n'avaient pas quitté l'Allemagne pour New York quarante ans auparavant, il aurait pu être un de ses compagnons d'armes.
La seule chose qui venait à bout des poux était le feu. On allumait la chandelle avant de passer la flamme sur les coutures du vêtement, là où ces bestioles se massaient par centaines. C'était tout un art de les tuer sans mettre le feu à votre chemise ou la roussir tellement que le tissu se déchirait au moment de la renfiler. On savait qu'on les avait tuées en les entendant exploser avec un petit pop. Lorsque les hommes étaient assis tous ensemble à s'épouiller, c'était comme si une mitrailleuse miniature se déclenchait.
"Si tu dois te battre, prends garde à tes choix. Parce que tu devras vivre avec pour le restant de tes jours."
Ellane92 - Boulogne-Billancourt - 49 ans - 17 octobre 2014 |