Sur les épaules de Darwin, tome 2 : Je t'offrirai des spectacles admirables
de Jean Claude Ameisen

critiqué par Nav33, le 26 février 2014
( - 76 ans)


La note:  étoiles
Science littérature et art. Une suite qui ne déçoit pas
Si « les Battements du temps » était le sous-titre du premier tome , c’est également le titre du chapitre III du 2ème tome . Les abeilles qui sont parmi les plus les grandes héroïnes de ce livre savent mesurer le temps , en se repérant par rapport par rapport à l’inclinaison des rayons du soleil , mais aussi par rapport à leur horloge interne. Cette perception du temps nous la partageons avec elles à l’état éveillé et même pendant notre sommeil. Vous vous réveillez d’une anesthésie comme si vous veniez d’être endormi il y a quelques secondes quel que soit le temps écoulé tandis que cette perception est complètement différente après un endormissement naturel. Mais comment se sont constituées ces horloges biologiques ? En amont de cette question comment des motifs réguliers peuvent naître d’un état uniforme dans la nature , telles les dunes de sables à partir d’une étendue plate. C’est par des détours improbables que le mécanisme élémentaire des horloges biologiques sera au bout de décennies identifié dans des cyanobactéries comme l’interaction de trois protéines : la science ne progresse pas en ligne droite.
Les mésanges volent certes , mais comme les pies elles sont aussi des voleuses. Elles privilégient les bouteilles de lait à capsule rouge , les plus riches en crème. Le rythme des cambriolages s’accélèrent parce que les congénères apprennent en observant les autres ou en faisant des déductions. Leur cerveau se transforme en apprenant , comme le notre. Chaque jour nous apprenons et oublions ou déformons nos souvenirs précédents. Ceci peut nous alarmer , mais c’est une nécessité d’adaptation à notre environnement . Cette nécessité qu’on trouve à l’échelle de l’évolution et qui est responsable des co-évolutions comme celles des fleurs et des insectes. Jean-Claude Ameisen l’exprime par l’image de la Reine Rouge de Lewis Caroll. Dans son monde explique-t-elle à Alice il faut toujours courir pour rester immobile.
J’ai illustré ce tome 2 par ces quelques exemples , choisis très subjectivement. Les évocations littéraires de JCA donnent également l’envie de lire ou relire de nombreux auteurs : José Luis Borges , Pascal Quignard….
La fourmi, l'abeille et le flocon de neige 7 étoiles

Le fil rouge de ce recueil de chroniques radiophoniques tourne autour de l’organisation des insectes sociaux : les fourmis, en tout premier lieu, puis surtout les abeilles. Jean-Claude Ameisen s’interroge sur l’intelligence sociale de ces insectes. Leur organisation y est scrutée, depuis les stratégies de recherche de nourriture, en passant par la répartition des tâches et les prises de décisions collectives.

C’est au final la possibilité d’une « émotion » et d’un langage « animal » qui est évoquée, à l’aune de ces insectes évidemment. Quoi qu’il en soit les nombreux exemples du livre sont passionnants. La complexité de ces sociétés animales et la richesse des interactions entre leurs membres donnent le vertige. Bien sûr l’exemple de la "danse des fleurs" des abeilles est très connue, mais on apprend aussi le cas de la « danse de l’essaim ». Réalisée par des « éclaireuses » pour le choix de la localisation de la nouvelle colonie, elle se fera sur un « débat contradictoire » et un « consensus » qui n’est pas sans rappeler un système que par anthropomorphisme on pourra appeler « la démocratie des abeilles ».

Dans ce livre on retient aussi certains portraits de chercheurs et de savants. Pour n’en citer que quelques-uns : Darwin tout d’abord, dont les citations et les extraits d’œuvres montre la clairvoyance et une profondeur de vue quasi philosophique. J’ai découvert à cette occasion d’ailleurs qu’il a écrit bien autre chose que L’origine des espèces comme par exemple Les expressions des émotions chez l’homme et l’animal ; Thomas Seley, dont on partage l’émotion quand il découvre enfin la signification de la « danse de l’essaim » ; enfin, Johannes Kepler qui s’émerveille et s’interroge sur la formation et la structure des flocons de neige... Le livre met aussi en avant la démarche scientifique, depuis une hypothèse jusqu’à la construction des expériences et les conclusions qu’on peut en tirer (ou pas d’ailleurs).

Je crois avoir préféré Je t’offrirai des spectacles admirables au Les battements du temps, un autre recueil de chronique du même auteur ici de son émission radiophonique sur les Épaules de Darwin. Les textes y sont peut-être plus homogènes et un peu moins bavards. Certes la prose de Jean-Claude Ameisen a toujours ce côté un peu lent, un peu hypnotique qui m’agace parfois, mais je suis bien obligé d’avouer qu’elle convient plutôt bien à l’ambiance contemplative et à la profonde réflexion que cette lecture peut engendrer quant à la compréhension du Monde et de la Nature, et la place qu’y tient l’être humain.

Fanou03 - * - 49 ans - 19 mars 2022


A la découverte d’un monde insolite et fascinant, celui des abeilles 9 étoiles

Si ce monde des insectes sociaux vous intrigue, les abeilles surtout, mais aussi les fourmis et les termites, si des réponses aux questions immémoriales qu’ils suscitent vous intéressent, si vous êtes prêt à partager avec l’auteur un récit mêlant harmonieusement science et poésie, politique et métaphysique, alors pas d’hésitation ! Comment ces êtres minuscules au cerveau gros comme une tête d’épingle arrivent-ils à dépasser en performances nos outils les plus modernes ? Des centaines de chercheurs se penchent sur le sujet. Les théories du chaos et de la complexité, les phénomènes d’émergence et d’auto-organisation, les modèles mathématiques d’optimisation, les observations de la neurologie et de l’épi-génétique sont mises à contribution pour comprendre leurs prouesses. Le récit va plus loin, plus haut, interroge sur leur sensibilité, leurs aptitudes mentales, il analyse comment ces êtres vivants, comme nous fruits de l’évolution, sont reliés au reste de l’univers.

Colen8 - - 83 ans - 12 décembre 2014