Genèse de l'oubli
de Clara Ness

critiqué par Libris québécis, le 20 février 2014
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Tels parents, tels enfants
Couper le cordon ombilical pour liquider les influences parentales ne garantit pas une personnalité forgée à partir de ses propres aunes. C'est le cas du jeune couple du roman. Hadrien est un Parisien qui a fui un père égoïste pour joindre le rang des chauffeurs de taxi de Québec. Il s'offre l'Amérique au volant d'une Thunderbird, symbole de la réussite par excellence après la Cadillac (noms venant de l'anglais au Québec sont féminins comme une job). Afin de se reposer de ses longues courses, il se paie des massages que lui prodigue Ariane, qui a quitté, elle aussi, sa famille étouffante. Les moments de détente de ce client enflamment suffisamment le cœur de la kinésithérapeute pour le suivre dans un appartement miteux, où naît la petite Lili.

Le passage obligé de leur maturation s'achève à la mort du père d'Hadrien. Cet élément déclencheur amène les héros à s'interroger sur les relations parentales. Leurs réflexions transcendent le comportement à adopter à leur égard. Ils se demandent plutôt si leur psyché n’est pas le résultat de leur genèse. En plus des traits physiques, dans quelle mesure hérite-t-on des traits de caractère? Tel père, tel fils, dit la maxime. La crainte de se reconnaître dans ses géniteurs pose un dilemme qu'on ne peut résoudre par la haine comme André Gide si l'on veut s'aimer soi-même.

Cette novella forme un diptyque qui suit en parallèle le cheminement d'Hadrien et d'Ariane. Clara Ness emprunte le décor de la ville de Québec pour établir leur dualité à travers de courts chapitres qui relancent la suite par d'excellentes chutes. Cette facture crée un suspense intéressant, dont le dénouement, malheureusement, s'avère décevant. Sans cette faiblesse et les thèmes à peine effleurés comme les distinctions culturelles, on pourrait savourer davantage ce roman.