La guerre de 14-18 racontée aux enfants
de Philippe Godard

critiqué par JulesRomans, le 7 février 2014
(Nantes - 66 ans)


La note:  étoiles
Pour ceux qui iront plutôt dans la Somme qu'en Meuse ou Seine-et-Marne
Philippe Godard propose là un album grand format de 70 pages. L'excellente idée est d'aborder un point sur une double-page avec des illustrations généralement de bonne taille et quand elles sont d'une surface moindre, il est toujours permis d'en comprendre le sens de façon autonome. On est dans une iconographie qui complète le contenu du texte, bien plus qu'elle ne l'illustre et on ne peut que féliciter de cette option prise. Ces documents sont d’ailleurs nombreux et variés.

Afin d'expliquer la Première guerre mondiale dans les grandes largeurs, on a choisi trente focalisations dont : le jeu des alliances, les pères au front, la vie des tranchées, mutineries et révoltes, les mères et les enfants au travail, les orphelins, Ginette retrouve sa ferme.

Une double-page est une invitation à aller visiter l'Historial de Péronne, et la très grande majorité des documents présentés sont issus des collections de ce dernier.

Par ailleurs lorsqu'on présentera des documents aux élèves, on se réjouira de pouvoir en proposer un bien en phase avec une des dimensions culturelles de sa classe. Les enseignants de Loire-Atlantique et du nord de la Vendée trouveront une photographie prise en août 1914 d'une soixantaine de soldats et de gradés du 64e RI d'Ancenis, en région parisienne et à Brest on appréciera de montrer une troupe portugaise qui finit de descendre du bateau qui vient d'accoster dans la célèbre rade (voir d'ailleurs "Première Guerre mondiale (Centenaire 1914-2014) : les soldats portugais dans les tranchées et la main d'œuvre portugaise à la demande de l'État français" de Manuel Do Nascimento si on veut approfondir pour soi la question), si on habite les Ardennes on se réjouira de voir des paysans de Brieules-sur-Bar accueillir très chaleureusement des soldats américains, et dans la Somme on sera content d'avoir une tranchée anglaise située à Ovillers-La Boisselle.

Des légendes un peu plus précises auraient été heureuses, ainsi sur le jeu des quatrarmes, ce n'est pas avec un simple général allemand que Joffre se mesure mais avec le Kronprinz (page 23) et une recherche iconographique plus poussée. Ainsi page 42, au lieu de mettre deux couvertures d'album de "Bécassine", on aurait largement préféré qu'une couverture du journal "Fillette" soit présentée (cité fort à propos, il a un tirage environ 3 à 4 fois supérieur au "Journal de Suzette" où on trouve "Bécassine "), et en supprimant la couverture de la très grande taille de "L'Épatant"on aurait dû mettre une page d'histoire en images. Il est évident que l'enfant ne se rend aucunement compte du contenu des revues pour les jeunes dans se pages 42-43, les couvertures ne parleront qu'à certains adultes.

Se pose également un autre problème ayant trait aux sources, celui des dates. La lettre d'un poilu à son fils présentée page 53 nous semble quelque chose de bien artificiel et aucune mention ne vient contredire cela. Le dessin page 50 a un contenu qui fait penser qu'il serait plutôt de la période 1925-35, ne pas mentionner certaines dates qui éclairent un document est très gênant pour un livre d'histoire destiné aux jeunes. L'enfant peut croire qu'un document a été produit durant la Grande Guerre, alors que ce n'est pas le cas. La reproduction pleine page d'un ouvrage de Hansi, dont on ne donne pas le titre (ni à la page où il figure, ni dans les crédits photographiques d'ailleurs), est du gâchis paradoxalement si on ne précise pas que le livre a été réalisé à la Belle Époque. Par ailleurs je n'ai pas trouvé la moindre présence (dans le texte ou l'iconographie) de Clemenceau, alors que Joffre et Foch sont fort justement présents.