Mon père, soldat de 14-18
de Christophe Malavoy

critiqué par JulesRomans, le 21 avril 2014
(Nantes - 66 ans)


La note:  étoiles
Plus didactique en matière de fiction, tu meurs touché au front ... de mal à la tête
L’action débute en l’été 1914 et le héros avec son père, ses deux frères et sa sœur sont en vacances chez les grands-parents. On ignore la profession du père mais il l’exerçait à Paris où la famille retourne. On suit toutes les péripéties du conflit et le peu d’intrigue est bâti autour de la chronologie de la Grande Guerre. Tout y est et même plus : évidemment la mère se fait embaucher au Val-de-Grâce où sont morts pas mal de poilus (je précise) et où sont soignés les blessés à la tête (dit le texte). Le côté didactique, qui n’a plus rien de pédagogique tant il est prégnant va essouffler le jeune lecteur. Au lieu de prendre des connaissances distillées au compte-goutte, il sautera allégrement le tout.

À cela vous rajoutez une connaissance qu’a l’enfant des idées et de la personne de Jaurès que rien ne justifie. Si l’auteur avait pris au moins la peine de faire du père un instituteur syndicaliste (ou un maçon libertaire de la CGT), le discours pacifiste qu’il plaque aurait été un peu moins artificiel. Le discours du narrateur, à savoir le jeune garçon, est le credo de l’auteur. Le héros ne risque pas de découvrir les idées pacifistes et l'action de Jaurès dans "L’Illustration" qui est citée, ni d’ailleurs dans "L’Humanité" des années de guerre mais par contre dans "Le Populaire" ou les bulletins du syndicat des instituteurs de la Seine.

Le contenu de la "Charte de la Liberté" proposé renvoie tout à la fois à une naïveté artificielle, à une maturité étonnante, à des côtés abscons et à de sensibles anachronismes. On le voit bien avec

« Article premier : les adultes sont irresponsables, donc dangereux. (…)

Article quatrième : nulle frontière ne peut entraver la liberté de circulation. Le mot "raciste" est supprimé du dictionnaire. (…)

Article onzième : l’éducation est la propriété de tous et la nature en est son principal fondement. »

Bref à un bourrage de crâne de l’époque au contenu qu’il désire ignorer, l’auteur choisit un autre bourrage de crâne dont il choisit le message avec un regard d'aujourd'hui. En matière de roman historique il est dans un excès d’événementiel (qui noie le jeune lecteur) et dans un manque de souffle historique (qui empêche l'enfant de saisir l’atmosphère de l’époque). Il est à noter que ce livre est paru, avec cette fois une illustration de Claude Cachin, sous le titre de "J’étais enfant pendant la guerre de 14-18". Les images de Hubert Van Rie font penser à des papiers découpés noirs, elles ponctuent l'ouvrage de façon intéressante en apportant une impression émouvante sur le vécu des poilus.