Valdemoras
de Patryck Froissart

critiqué par Eve Zibelyne, le 4 décembre 2013
( - 67 ans)


La note:  étoiles
Charmée
Un livre qui surprend autant qu'il accroche le lecteur. Un fil conducteur habilement tissé, enchevêtré d'un vocabulaire soutenu qui demande parfois la présence du dico, je me suis faite happer jusqu'au bout, et je le relirai. On sent l'amour des mots, que je connaissais dans la poésie de l'auteur, et cette jubilation d'en user qui se transmet comme un virus sympathique.
A recommander à toute personne qui apprécie la saveur de la langue. L'histoire fleure le vécu d'une époque et de lieux à l'attractivité magique, laissez-vous transporter !
Un roman haletant 10 étoiles

Etant donné que le premier tome " La mise à nu " était difficile à lire, bien que fort intéressant, je pensais que le second serait plus facilement abordable et que l'auteur y serait plus charitable envers ses lecteurs.

Eh bien non ! L'auteur est resté fidèle à lui-même et à sa méthode, originale, qui consiste à nous pousser à utiliser souvent le dictionnaire, à réfléchir plus d'une fois sur certaines expressions, et à remettre à jour notre mémoire à propos de certains événements des années 68 - 69 et 70 du siècle dernier en France ou dans le Monde.

La concentration est de mise, sinon le lecteur se trouve semé, perdu, déboussolé ou paumé dans ce nouveau sérail des Mille et Une Nuits, car Valdemoras aurait pu donner à Shéhérazade des idées pour faire largement un autre Tome des Mille et Une Nuits! Aventures garanties, érotisme et sensualité à volonté, sans que le lecteur s'ennuie, sans que jamais il se lasse. Au contraire il reste pris aux lacets du récit, grâce au style fin, galant, nourri par une très vaste culture, et riche d'une immense instruction dont l'érudit connaît le secret. Le passé simple et l'imparfait du subjonctif confirment l'auteur lettré et donnent une harmonie bien particulière aux aventures de ce ou ces coopérants qui allaient enseigner la langue Française aux Maures habitant un pays voisin de l'Atlantique.

Vademoras, sous-titré Alkhanjar, ou plutôt le super "mille et une nuits'', trace les aventures et les exploits sexuels d'un coopérant, originaire du Nord de la France. Au départ une halte à Marseille lui permet de prendre la température de ce qui l'attendra de l'autre côté de la Méditerranée.

Plus tard, trois villes impériales subissent l'assaut du jeune coopérant, nommé J . La capitale administrative lui réserve un accueil de bienvenue, mais elle lui enseigne aussi à être prudent dans la vie, chose qu'il appliquera plus tard dans la capitale ocre du sud, puis dans la capitale culturelle et spirituelle avant d'arriver enfin, transporté dans les entrailles d'un célèbre autocar d'une autre époque, au fin fond d'un village se trouvant au cœur du moyen Atlas.

Le coopérant est subjugué par la beauté du paysage (et je peux le comprendre), mais aussi par ces gazelles qui portent du pain au four public, ou par celles qui sont habillées d'une blouse de collégienne …

"De fraîches collégiennes en blouse rose, aux joues melliflueuses, à la double natte impeccablement tressée, à l'adolescence formellement et précocement attractive, aux sourires directs, troublants, séducteurs (si vous lisez ceci, J vous le redit : Ah! Mes chères élèves ! Oh ! que vous étiez belles ! Aussi éclatantes que les coquelicots de l'Atlas, aussi éblouissantes que les neiges qui miroitaient toute l'année aux haut des pics du Bou Iblane"

Quel bel hommage aux filles d'Al Khanjar !

La curiosité de J l'amène à découvrir habitudes, traditions et façons de vivre du pays et à mettre le doigt également sur l'hypocrisie d'une société dont les tabous cachent une vie digne des mille et une nuits. Cela me fait penser au curé qui dit à ses fidèles : « Faites ce que je dis, mais ne faites pas ce que je fais!»

J fait dans ce roman tout ce qu'il veut ou presque. La camionnette qui démarre à la fin du livre est chargée des affaires et de la nostalgie de J et prend la direction du Nord du pays des Maures...

Vivement le troisième Tome!

ELHARIRI - - 73 ans - 19 décembre 2013