L'Alsace au temps du Reichsland 1871-1918, un âge d'or culturel?
de Gabriel Braeuner

critiqué par JulesRomans, le 10 novembre 2013
(Nantes - 66 ans)


La note:  étoiles
L'Alsacien abondamment nourri culturellement, se rassasie matériellement devant son Kouglof
Entre 1871 et 1914 l’Alsace se pose la question de son identité dans des conditions où aucun souvenir historique traumatisant ne s'impose. Son univers culturel littéraire s’exprime en trois langues : allemand, français et dialecte. Ce dernier n’est pas brimé par les autorités impériales car il est un moyen d’aider au détachement envers la culture française, toutefois il connaît un très grand risque de contamination par l’allemand officiel tant que l’Alsace-Lorraine sera intégrée au Reich. On va même jusqu’à dédier à l’empereur des vers en dialecte alsacien lors de visite officielle de membres de la famille impériale ou dans des messages de remerciements. Très nombreuses sont les pièces joués en alsacien mais elle fige une vision folklorique de la province.

Le nombre de pièces que l’on peut jouer en langue française dans les grandes villes est soumis à un quota et il n’y a que des créations d’Alsaciens de familles ayant opté pour la France en 1871. Dans le domaine romanesque, on se retrouve dans la même situation et seule la poésie francophone se voit enrichie par des auteurs résidant en Alsace comme Georges Spetz et Elsa Koberlé. Les écrivains alsaciens sont très nombreux à s’exprimer en allemand. Toutefois des hommes de plume, et en particulier Ernst Stadler (mort devant Ypres en 1914 à 31 ans), qui écrit en allemand trouve leur inspiration dans des formes et des thèmes en usage dans la littérature française.

C’est l’occasion de croiser Hans Arp et Albert Scweitzer pour ceux qui se retrouvèrent français en 1919 et Otto Flake pour ceux qui rejoignirent l’Allemagne ou l’Autriche, René Schickele lui fait des allers-retours de chaque côté du Rhin. Tous les arts sont passés en revue et l’auteur en profite pour noter que Hansi (oublié dans l’index, il n’y figure que lorsque son vrai nom est cité) comme caricaturiste fait de l’imitation du trait de Heine de la revue allemande "Simplicissimuss" et comme peintre, dans ses productions originales, un disciple de l’art nouveau à dimension internationale (page 83).

C’est évidemment la dimension architecturale de la culture du Reichsland qui reste la plus présente aujourd’hui, il faut dire que de nombreux bâtiments urbains sont construits et que le château du Haut-Koenigsbourg est reconstruit dans l’esprit que l’architecte allemand Bodo Ebhart se faisait du monde médiéval et de la présence de l’empire romain-germanique en Alsace. On lira en complément à cet album de BD "Cette histoire qui a fait l'Alsace, tome 11: l'Alsace dans le Reich" qui sort fin 2013. On y trouvera un complément iconographique déjà assez abondamment présent dans "L’Alsace au temps du Reichsland 1871-1918 : un âge d’or culturel".