Le Ballet des sorcières
de Jacques Sadoul

critiqué par Ellane92, le 23 janvier 2014
(Boulogne-Billancourt - 49 ans)


La note:  étoiles
Sorcières d'hier et d'aujourd'hui
Le comte Aymond de Bruihl, aristocrate complètement fauché, survit en organisant des messes noires pour les bourgeois désœuvrés en manque de sensations fortes du sud-ouest de la France, avec l'aide de sa fille Morguil et de son fils Bertrand. Il poursuit en secret un objectif hors du commun : faire revivre la puissance et la richesse de ses ancêtres en convoquant un démon majeur et en l'asservissant. A l'occasion d'un de ses essais, une partie du démon Lucifuge Rofocale, premier ministre des milices infernales, est appelée sur Terre et ne tarde pas à détruire biens et personnes. Les remous « dans l'Ether » provoquée par cette apparition poussent la nymphe Mylène à quitter le ciel jaune du pays des Rêves pour venir voir ce qu'il se passe, espérant ou devinant que son ancien maitre, le châtelain de R., qui l'avait autrefois invoquée et lui avait donné son corps, reprend ses activités. Quand elle s’aperçoit qu’il n'en est rien, la nymphe, aidée d'Ai-d'moloch, converti à la cause de la Nymphe pour éviter que ne soit détruit de le domaine de son maitre, décide de partir en chasse du démon avant qu'il ne laisse rien sur Terre. Et c’est ainsi qu’en débarrassant la Terre de du démon, ils provoquent l’envoi de la jeune Morguil dans le temps, en pleine période inquisitoriale.

Comme à son habitude, Jacques Sadoul nous livre, avec le Ballet des sorcières, un livre bien écrit et très documenté : l'évocation des messes noires, sabbats, opérations magiques sont très réalistes, de même que les reconstitutions du passé et des procédures inquisitoriales. Le lecteur intéressé par ces sujets trouvera une bibliographie bien fournie en fin d'ouvrage. L’histoire quant à elle est menée sans temps mort, avec pas mal d'action et d’humour.
Ce livre évoque surtout les sabbats et la chasse aux sorcières, au 17ème siècle et aujourd'hui. La seconde partie de l'ouvrage qui se passe au début des années 1600, met en scène des personnages et des évènements ayant existé. Sadoul en profite pour réhabiliter un certain de Lancre, juge chargé de découvrir et condamner les sorciers et sorcières dans le Labourd et dont plusieurs ouvrages ont fait le procès. Il semblerait, nous dit Sadoul, que de Lancre envoya au final peu de monde au bûcher et toujours selon de fortes présomptions de culpabilité. Dans les ouvrages qu’il a compulsés pour écrire ce roman, quelques lignes énigmatiques autour d’une certaine Morguil, qui aurait aidé de Lancre dans sa tâche, ont donné naissance au personnage principal du Ballet des Sorcières.
Jacques Sadoul est mort en en janvier 2013, dans ce Lot-et-Garonne qu’il mettait si souvent en scène dans ses romans. Le Ballet des sorcières représente donc pour ses fans la dernière visite de la si asociale mais si mystérieuse Mylène dans ce monde réel. Puissent les êtres de l’Ether, dont il nous a si longtemps conté les déboires, lui réserver bon accueil !

- Ne perd pas de temps à te défier de moi, ajouta Mylène. Lors de la prochaine tentative, je sentirai les vibrations engendrées par la conjuration et je te dirai de quelle direction elles viennent. Cela restreindra le champ de recherche de tes gendarmes.
- J’ai l’impression que vous en savez beaucoup plus que vous ne voulez bien le dire. Cela ne servirait à rien de jouer au chat et à la souris avec moi, confiez-vous plutôt.
- C’est moi le chat, dit la nymphe en riant.
En regagnant la rue, le juge se dit que la fille était folle, puis elle rit aussi, ne l’était-elle pas tout autant d’écouter ses élucubrations ?