L'enquête russe
de Jean-François Parot

critiqué par Falgo, le 7 octobre 2013
(Lentilly - 84 ans)


La note:  étoiles
Remarquable
Jean-François Parot nous entraîne à nouveau au coeur du 18° siècle. Cette fois, il déroule une belle histoire d'espionnage qui met en jeu l'ambassade de Russie au moment où le prince Paul, fils de Catherine II, fait une visite "privée" en France. Il n'est pas utile de tenter de décrire la complexité des évènements qui se succèdent, générant une série de crimes horribles. Par contre il l'est de dire combien Parot maîtrise totalement sa capacité à entraîner son lecteur dans les méandres qu'il trace et les rebondissements qu'il invente. Si, dans les premiers livres cela sentait un peu l'artifice, maintenant tout détail est en place avec une sûreté confondante.
On se retrouve bien entendu chez M. de Noblecourt avec les personnages habituels de la série, les agapes, les recettes succulentes, les conversations raffinées et pleines d'esprit. Mais aussi avec une série nouvelle de personnages, les russes en particulier, également hauts en couleurs. Et le miracle de cette langue savoureuse continue d'opérer, capable par sa seule magie de plonger le lecteur dans le siècle. Ainsi, hors du contexte, qui peut dire ce que signifie l'expression suivante: "..il empruntait par trop souvent le souterrain de la rue de la lune." (p.78)?
Les séides de Catherine 7 étoiles

Je serai un peu plus réservé que les deux critiques précédentes.

L'histoire de L'enquête russe qui mêle crimes sordides, diplomatie et espionnage sur un vaste fond de géopolitique rappelant le jeu des différentes puissances européennes à la fin de la guerre d'indépendance américaine, ravira les amateurs d'Histoire dont je fais partie.

Les personnages ont une certaine étoffe, les dialogues sont souvent plaisants, néanmoins je n'ai pu m'empêcher de trouver l'intrigue un peu alambiquée et « fabriquée ». J'ai été gêné notamment par les passages obligés comme les recettes de cuisine infligées au lecteur qui, à mon goût, s'accordent mal à l'économie du récit : si le héros est réellement pressé par le temps, on a du mal à comprendre qu'il divertisse son esprit par des éléments qui tiennent de l'accessoire. Ainsi, dans un tableau, on trouve plus naturel que le peintre laisse en esquisse et dans un certain flou ce qui ne constitue pas le sujet de la toile.

Les tourments de notre commissaire au Châtelet, ses doutes devant les compromissions nécessaires de la raison d'Etat, lui donnent un côté philosophe, mais paraissent peu plausibles au regard de la réalité de la charge.

Ces réserves ne m'ont nullement empêché de passer un agréable moment, à la fois dépaysant et instructif avec ce livre qui se lit rapidement.

Kostog - - 51 ans - 10 septembre 2019


Remarquable. 10 étoiles

-Ecoutez, messieurs :
J’ai quatre-vingt-dix ans, j’arrive d’Epidaure ;
Esculape a reçu mon premier Ex Voto.
On aime ses vieux jours autant que son aurore :
Chacun sur mon visage avait crié Haro !
L’expérience soutient et le succès restaure ;
Me voici rajeuni et presque sans bobo.
Mon front était ridé, mon teint celui d’un maure,
Quand je parlais, mes dents partaient ex abrupto .
Une seule restait servant de memento.

Une acclamation générale salua la péroraison.
-J’en veux une copie ! s’écria l’amiral.
- Il s’est encore vieilli !murmura Semacgus. Mais c’est pour le nombre de pieds…
Heureux qui dans ces vers, sait d’une voix légère,
Passer du grave au doux, du plaisant au sévère !
Les adieux se prolongèrent dans la rue Montmartre où Louis et Nicolas avaient accompagné les invités jusques à leurs équipages. Ils remirent au lendemain le moment de se parler plus longuement. Nicolas rejoignit l’appartement de M. de Noblecourt, qu’il désirait saluer avant de se coucher. Il avait ôté sa perruque et son crâne nu luisait à la lueur des chandelles. Il semblait courbé, vieilli, et murmurant des mots sans suit .
-Monsieur, dit Nicolas après avoir marqué sa présence d’une toux discrète, je souhaitais vous donner le bonsoir. Cette soirée a été une réussite qui marquera ses participants . L’amiral ne tarissait pas d’éloges à votre égard.

Pierrot - Villeurbanne - 72 ans - 15 mai 2017