Chat sauvage
de Jacques Poulin

critiqué par Libris québécis, le 29 mars 2003
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Les Coeurs généreux
Après une rupture et un infarctus, un homme s'installe à Québec, où, pour gagner sa vie, il devient écrivain public, métier souvent rencontré au Québec pour répondre aux besoins des nombreux analphabètes avant la création du ministère de l'Education en 1964. Pierre Yergeau a aussi traité le sujet dans un roman qui s'intitule justement L'écrivain public, et dont la critique apparaît sur ce site.
Jack, le héros, adore écrire. Comme il reçoit souvent des demandes pour rédiger des lettres d'amour, il collige les phrases des grands écrivains sur le sujet, qu'il tente par la suite de glisser dans le corps de ses textes. Il fait aussi un peu de traduction. Ce passage pourrait faire partie d'un cours d'initiation sur le sujet. Sa critique des traductions françaises des oeuvres américaines est des plus pertinente. Les traducteurs de la France ont de la difficulté à franchir la barrière culturelle qui les sépare des Etats-Unis. Une oeuvre de John Irving, selon le héros, est méconnaissable une fois traduite, ce en quoi je partage son avis surtout quand il s'agit de sport et des canailles.
Mais l'essentiel du travail de Jack est la rédaction de lettres pour des clients souvent désemparés comme cet homme de son village natal qu'il ne connaissait pas. Ce dernier lui commande un jour des lettres d'amour pour sa femme dont il vient de se séparer. Le héros, intrigué par son attitude, décide de le traquer. Cette chasse à l'homme tranquille dans les rues de Québec sert de fil conducteur à Jacques Poulin, qui en profite pour nous dévoiler les charmes de cette ville érigée à flanc de falaise et exigeante pour l'endurance cardio-vasculaire. Finalement, le héros trouvera son homme dans un restaurant en compagnie de la véritable destinataire des lettres.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que le héros est un être généreux et très préoccupé par le sort de ses semblables. Quand sa copine se sent mal en point, il l'emmène à Old Orchard, une station balnéaire américaine fréquentée par de nombreux Québécois, afin qu'elle retrouve la forme. Il vient en aide aussi à un sans-abri en l'autorisant à se servir de sa fourgonnette pour se loger, il peut payer un repas à des gens démunis, comme à cette adolescente marginale, qui deviendra la clé du dénouement. Cependant sa générosité ne lui rapporte rien. Plus souvent qu'autrement, il doit plier bagage et s'aligner autrement après avoir été délaissé par les autres. Il ne jouit pas des retours d'ascenseurs. Au contraire, ils lui passent au nez.
C'est une oeuvre qui se passe tout en douceur. On ne crie pas ses malheurs. L'auteur a choisi la voie discrète où ses personnages marchent à pas feutrés. Ca ne veut pas dire que le dénouement n'aura pas son effet du tonnerre. C'est le calme avant la tempête, mais les situations malencontreuses ne sauront désarçonner ce héros valeureux. Cette oeuvre est soutenue par une écriture qui s'adapte bien à ses personnages taciturnes. Elle s'efface pour garder le focus sur eux.
Chat sauvage 5 étoiles

Présenté comme un classique de la littérature québécoise, je me suis donc intéressé à Jacques Poulin. Les 100 premières pages de "Chat Sauvage" sont prenantes, sans casser de briques pour autant. Mais au bout du compte, l'écriture de ce roman est ennuyeuse car il ne se passe pas grand chose. Qualifié de minimaliste par certains, j'y vois surtout du vide, du remplissage transparent qui ennuie.

Les seuls passages qui m'ont permis d'aller jusqu'au bout de ce court roman sont ceux dédiés aux auteurs et aux lectures. Mais ils ne font que quelques pages dans tout le roman...

Ravachol - - 41 ans - 2 juillet 2012


L’histoire d’un homme humble. 9 étoiles

L’histoire de cet homme, Jack écrivain public au grand cœur, est touchante. Il mêle à ses lettres des passages d’écrivains classiques, mais ne se fait pas toujours régler. Sa santé est fragile, sa bonté lui joue des tours, mais humblement il persévère, même s’il n’est pas souvent récompensé. Kim, son amie est tout en douceur et rondeurs. Il nous fait visiter le vieux Québec en suivant son enquête sur ce «Vieil Homme» qui l’intrigue et qui lui fait écrire des lettres pour sa femme. Macha jeune fugueuse et la vieille Marie ont en commun l’amour de la littérature et sont des personnages majeurs de ce roman. Les problèmes de traductions donnent, avec les élucubrations du Gardien un soir d’ivresse un côté joyeux, ce qui n’est pas le cas avec l’Humoriste, personnage le plus antipathique du livre. L’écriture est comme Jack, apaisée, calme comme si, après la maladie la vie m’était plus qu’un cadeau.

Eireann 32 - Lorient - 77 ans - 15 mars 2005