Le joueur de quilles
de Alain Beaulieu

critiqué par Libris québécis, le 25 juin 2013
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
La littérature et le mafioso
Avec ce roman, Alain Beaulieu aborde le dilemme exposé dans Au pied de la Pente Douce de Roger Lemelin. Attentif au sort des enfants de sa génération, l’auteur se demande ce qui leur adviendra après avoir connu une enfance qui s’est conjuguée avec la pauvreté dans les quartiers défavorisés de Québec.

Pour échapper à ce sort, Rémi Belleau a joint les rangs de la criminalité comme mafioso à la tête d'un réseau contrôlant le commerce de la drogue et de la prostitution. Pour assurer sa protection, il propose à Samy Martel d’écrire sa biographie moyennant la somme de 50,0000 $. La commande est assez alléchante pour que cet auteur délaisse l'œuvre en chantier, d’autant plus qu’elle vient d’un homme enraciné dans le même terreau. Même si sa femme le déconseille d’accepter ce projet de glorification, Samy Martel l’entérine pour établir la part de responsabilité de l’État dans la fabrication des criminels issus des rangs de la panade. Ce travail d’écriture lui fait découvrir que sa propre famille est également liée au monde interlope pour promouvoir l’indépendance du Québec sous la couverture d’un champion de quilles.

Le roman couvre l'espace qu'occupent les rejetés de la société, désireux d’occuper une aire enviable grâce au crime. Ce rêve paradoxal suit en parallèle celui de tout un peuple en quête d’outils propres à sa croissance. La comparaison donne à l'œuvre une saveur politique qui montrera aux nationalistes que, derrière l’or qui brille, se cachent des magouilles condamnables. En fait, à travers un roman aux allures policières, l’auteur se demande si la fin justifie les moyens. La thématique est intéressante, mais la mécanique qui l’actionne produit parfois des soubresauts.