Ecoute la pluie
de Michèle Lesbre

critiqué par Aliénor, le 6 juin 2013
( - 56 ans)


La note:  étoiles
Court et dense
Les romans de Michèle Lesbre sont courts, denses, et remarquablement écrits. C’est une nouvelle fois le cas ici, avec cette histoire de femme dont la vie bascule soudain dans le métro. Alors qu’elle attend sur le quai la rame qui la conduira vers son amant, un vieil homme se jette sur les rails après lui avoir souri. Bouleversée, elle s’enfuit en courant et nous entraîne dans une longue nuit d’errance à travers Paris. Une nuit d’errance qui est l’occasion pour elle de faire le point sur sa vie, et sur sa relation avec cet amant éloigné qu’elle s’apprêtait à rejoindre pour le week-end. Comme si le geste désespéré de cet homme était un signe pour la contraindre à ouvrir les yeux.

Mon seul regret après cette lecture tient finalement dans ce qui fait la qualité et la particularité des romans de Michèle Lesbre. Ils sont concis et ciselés, mais j’avoue que j’aimerais goûter sa superbe écriture sur un nombre plus important de pages.
Qu'aurions-nous fait à sa place ? 8 étoiles

Assister à un suicide d'un vieil homme qui lui a souri la seconde avant de se jeter sous le métro, cela doit être horrible. Qu'aurions-nous fait à la place de cette femme qui allait rejoindre son amant ? Elle part dans une nuit d'errance, elle dérive. Elle dérive sur sa vie. Elle se jette, elle, dans sa propre introspection.
Qu'aurions-nous fait ?
Je me suis retrouvé, seul, sur le quai du métro, après l'annonce de la fermeture d'une ligne. "En raison d'un suicide" a dit le haut-parleur. Je me suis retrouvé seul, moi, le provincial. Et j'ai pensé à cette personne, à sa famille. Alors que le troupeau humain avait déserté les quais à une vitesse indécente. Je me suis retrouvé seul, comme a dû l'être cette personne, comme a dû l'être le personnage du livre. Et j'ai été choqué, sonné d'être là. Drôle d'endroit.
Qu'aurions-nous fait en assistant à cette chute ? Michèle Lesbre ose mettre des mots sur ce qui nous bouscule et sur ce quoi nous n'osons pas nous pencher auparavant.

Klein - - 60 ans - 28 novembre 2013


doux et mélancolique 7 étoiles

Une jeune femme assiste au suicide d'un vieil homme dans une station de métro après que celui-ci lui ait souri. Elle sort du métro bouleversée et erre dans les ruelles de Paris pour tenter de comprendre cet acte.
Ce roman décrit l'errance de cette femme qui voit ressurgir et défiler tout son passé et son histoire d'amour avec son amant qui l'attend à l’hôtel Embruns. Des bribes de souvenirs apparaissent dans l'esprit de cette femme pas de manière linéaire en fonction des sensations et des objets qui l'entourent elle se remémore des journées passées avec son grand père son amant le photographe qui prenait des clichés et qu'elle ne comprenait pas tout le temps. C'est une véritable interrogation sur sa vie qui la traverse durant cette nuit, nuit pluvieuse, nuit de remise en question de soi même. L'événement déclencheur ici le suicide suscite un lot de questionnements sur le rôle de la vie, de la recherche du bonheur. J'ai retrouvé du Zweig, du Modiano, dans les descriptions des sentiments et de la promenade de la jeune femme. Michel Lesbre s'interroge aussi sur le hasard qui gouverne nos vies, notre inconscient, sur la possibilité de tout remettre en question avec un événement traumatisant. Comment réagir, comment continuer à vivre avec autant de violence. Une prose ciselée, fine comme de la dentelle sur uniquement 100 pages, 100 pages de pluie extérieure, de pluie intérieure dans un café où l'on danse le tango. Belle introspection de la narratrice, belles images, beaux clichés, enivrante atmosphère dans ce Paris nocturne. Il vous suffit d'écouter la pluie, chargée d'histoire, de nos histoires, de nos bribes de souvenirs.

Kian996 - - 28 ans - 5 juillet 2013