La courte année de Rivière-Longue
de Élise Lagacé

critiqué par Libris québécis, le 28 mai 2013
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Comme le conte des trois petits cochons
C’est dans le Bas-Saint-Laurent que l’auteure a planté son décor, soit à Rivière-Longue, un village fictif situé en bordure du fleuve Saint-Laurent. La population n’a pas l’esprit d’aventure. Chacun chez soi et les vaches seront bien gardées. Telle est la devise qui anime les villageois. On glorifie le quotidien, dont on tait les moindres faits et gestes. C’est l’omerta qui règne en maître dans le village. Bref, on mène une vie monastique réglée comme une horloge suisse.

Le silence a bien meilleur goût. Mais Aline en a marre de ravaler ses frustrations. Un bon jour, elle abandonne son mari et sa fille pour se libérer de la chape de plomb qui pèse sur ses épaules. Roland, un nouveau résidant malvenu dans ce microcosme, croit fermement que la jeune femme reviendra au bercail. En attendant son retour, il s’applique à rénover « la maison seule » construite en marge du village. Ce n’est pas une mince tâche. Le quincailler refuse de lui vendre les matériaux nécessaires à sa restauration. Roland ne renonce pas facilement au but qu’il s’est fixé. Il se rend à Sainte-Rita pour se les procurer. Et petit à petit, « la maison seule » se donne un nouveau look.

Elle devient même le centre de tous les paumés. Chacun participe aux travaux, même l’idiot du village. C’est un pied de nez à ceux qui militent en faveur du chacun pour soi. Cette construction devient l’âme d’un village esseulé. La maison seule se transforme peu à peu en une maison peuplée de toutes les aspirations de ceux qui se sont tus. Même les animaux, détestés de la population, célèbrent ce renouveau, tels le chat Verlaine et l’ours qui concourent à la réalisation de ce rêve impossible dans un univers condamné à la sclérose de la population.

En somme, c’est un conte qui montre que l’on peut éventer les mœurs rédhibitoires qui étouffent les villageois. Avec une écriture dépouillée, l’auteure découpe tous les possibles qui rappellent le conte des trois petits cochons. Bref, c’est un roman qui demande à la vie de s’exprimer sans nager dans l’eau de rose même si le dénouement est un brin idéaliste.