L'invention des Français: Du temps de nos folies gauloises
de Jean-François Kahn

critiqué par Lejak, le 26 mai 2013
(Metz - 49 ans)


La note:  étoiles
Démocratisation historique de la Gaule : populaire et passionante mais brouillonne
On reconnait immédiatement le style "JF KAHN" pour ceux qui le connaissent de la presse écrite (Marianne) ou de la télévision principalement comme polémiste.

Il s'attaque ici à une période de notre Histoire qui - comme il aime à le vendre dans sa 4ème de couverture - n'est que très peu médiatisée en dehors des images d’Épinal habituelles ; c'est-à-dire Vercingétorix comme héros de la lutte pour l’indépendance de la Gaule face à César.

Mais il n'y a pas une Gaule mais des Gaules.
Effectivement qui sait qui était véritablement Vercingétorix ? Pourquoi s'est-il battu et avec qui ? A t-il été le seul à se révolter contre l'occupation romaine ? avant lui ? après lui ?
Qui étaient ces Gaulois, d'où venaient-ils, comment vivaient-ils ? Ont-ils une parenté avec ces "Germains" étiquetés d'envahisseurs ? Que sont les Celtes par rapport aux Gaulois ? etc ... etc ...

Voici de quoi nous éclairer dans un style populaire. JF KAHN utilise des formules de tous les jours pour résumer en quelques mots le bilan d'une bataille ou d'une lutte politique. Ça a le mérite d'être clair ... certes peu académique ; et il le revendiquera !

Le reproche que l'on pourra opposer à cette volonté d'éclairer nos lanternes par un discours contemporain et non élitiste, c'est que la construction du livre est brouillonne.
Il saute d'une époque à l'autre, entre la Pax Romana, Vercingétorix, Néron, puis revient à la fondation de Marseille, nous évoque les 1ers Celtes. Ça va un peu dans tous les sens et l'on s'y perd.
Pour ne pas perdre le fil, l'ouvrage aurait mérité une petite frise chronologique, une bio succincte des principaux personnages mentionnés, et des cartes de la Gaule à différentes époques avec les grandes villes, les territoires des principales tribus etc. ...

Pour conclure, un livre intéressant pour découvrir de façon amusante nos aïeuls Gaulois.
1000 ans d’histoire des Gaules, à ne pas manquer 9 étoiles

Concoctée façon polar, cette histoire de « nos ancêtres les gaulois » vaut le détour. On y retrouve l’esprit des séries d’Astérix côté BD ou des Visiteurs côté film historico-burlesque. C’est l’évocation d’une histoire très orthodoxe des Gaules, de leurs conquêtes et de leur romanisation étayée par les plus grands historiens : Cicéron, Tacite, Flavius Joseph, Suétone dans l’antiquité, Michelet, Lavisse plus récemment. Truffée d’anachronismes ouvertement revendiqués surtout contemporains qui en font tout le sel on regrette qu’elle ne nous ait jamais été enseignée.
Tout commence à Marseille, cité commerciale grecque entre les mondes latin et gaulois. Par elle se distillent les idées, les mœurs qui vont produire par assimilation croisée le métissage dont nous émergerons. La conquête des Gaules par Jules César n’est que l’aboutissement d’un long processus d’acculturation sur fond d’histoire romaine parallèle. C’est une succession foisonnante de pouvoirs qui se font et se défont lors de guerres, de conquêtes, de pugilats, de massacres dans tous les camps entre des épisodes plus calmes. La défaite de Vercingétorix à Alésia comme seul événement marquant apparait dérisoire à côté des multiples épopées gauloises qui l’ont précédée puis suivie, ponctuées de révoltes, soulèvements, alliances et trahisons. La puissance des armées romaines c’est avant tout l’ordre et la discipline.
Face à elles les gaulois y vont dans une sorte de folklore qui leur vaut ensuite bien des déboires. Animés par l’esprit de résistance, ils n’en ont pas moins admiré le modèle romain au point de l’adopter en grande partie. Le récit s’achève sur une réflexion élargie à propos de l’origine en partie ignorée des peuplements celtes installés sur les territoires qui deviendront les Gaules. Ce sont que des flux continus venant du Nord et de l’Est qui se fondent ensuite les uns dans les autres par familles, clans puis tribus interposés. Le peuple est issu du sol non de la génétique. Les racines gauloises sont présentes dans une grande partie des noms de nos villes et de nos régions. Les talents des gaulois, leur créativité, leur raffinement vont s’épanouir pendant la « pax romana » consécutive à la conquête. Celle-ci est propice à l’adoption volontaire puis à la généralisation du modèle latin qui durera plusieurs siècles, avec en filigrane les idées de liberté, de justice, d’égalité.
La suite annoncée, et c’est la thèse de Jean-François Kahn, se produit avec l’invasion des Francs. Loin d’être cette aristocratie rêvée par le pouvoir monarchique ils ne sont qu’une tribu germanique comme beaucoup d’autres qualifiées de « barbares ». Le sacre de Clovis à Reims, événement dit fondateur dans nos manuels scolaires est celui qui éteint pour une nouvelle ère de 1000 ans jusqu’à la Renaissance, le brillant développement de gaulois fortement imprégnés des civilisations gréco-romaines. Il l’enfouit dans l’obscurantisme d’une force judéo-chrétienne qui marque le début du Moyen Âge.

Colen8 - - 82 ans - 16 novembre 2015