Pleurer comme dans les films
de Guillaume Corbeil

critiqué par Libris québécis, le 25 mai 2013
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
L'Hosanna des femmes
Que sont devenus les Français établis en Nouvelle-France ? Guillaume Corbeil trace les contours d’une géographie que le peuple n’a pas osé marquer de sa personnalité.

Ce roman freudien se caractérise par l’absence paternelle conformément à la particularité de notre littérature telle qu’elle apparaît depuis la conquête anglaise. Comme pour l’œuvre de Michel Tremblay, c’est l’hosanna des femmes. Elles tiennent les rênes d’un univers émasculé. Les protagonistes principaux sont des cousins, soit une fillette et un garçon élevés sans pères signifiants. La génitrice du garçon lui prédit une carrière d’écrivain retentissante tandis que ce dernier entreprend de donner une vision idéale du monde à sa cousine, une orpheline de mère abandonnée par son père au profit des manettes de la grue qu’il opère.

Dans une famille dépourvue d’étamines, on comble le vide par des expédients. La volonté glisse sous le tapis qu’étendent des « matantes », dont l’opinion est déterminante. On laisse aux autres le soin de tricoter le pays en croyant que l’avenir s’arrangera par magie en faveur d’un peuple amorphe, qui emprunte une image de faussaire à l’instar du chat mort que la mère du garçon actionne avec son pied pour lui donner une apparence de vie souveraine.

C’est le règne de l’illusoire qui prime. Le roman passe au crible une existence québécoise à faire « pleurer comme dans les films ». L’allégorie échafaudée par Guillaume Corbeil tient mieux la route que son précédent roman d’autant plus que son écriture s’est ébourrée de son gongorisme.