À moitié Caïn
de William Goyen

critiqué par Jlc, le 24 avril 2013
( - 81 ans)


La note:  étoiles
A moitié Caïn…et Abel alors ?
William Goyen nous raconte une histoire qui tient du roman fantastique, du poème symbolique, de la parabole allégorique, de l’étrange qui peut-être aussi merveilleux que sinistre, voire sordide. Comme souvent chez lui on retrouve dans ce livre des personnages, des situations, des images, des événements puisés dans la Bible, rencontrés dans d’autres récits tels « Zamour et autres nouvelles », « Savanah », « La porte précieuse », « Le chemin de Rhody » etc.

Dans l’extrême nord-ouest des Etats Unis, quand les éléments se déchaînent, le sort des bateaux tient à la qualité exceptionnelle des gardiens de phare dont le sens de la navigation évite bien des naufrages. Ce ne fut, hélas, pas le cas pour un navire transportant un petit cirque. Le gardien, Curran, a eu une mort violente, inexpliquée. Il est retrouvé dans le plus grand désordre du phare, serrant encore ses jumelles dans sa main gauche. A-t-il été tué par ce qu’il avait vu ou par ce qu’il ne pouvait pas voir ? Son successeur retrouve son carnet de bord qu’il doit retranscrire « pour les archives ». Il croit comprendre que Curran aurait été victime d’une idée qui « pourrait être dangereuse si elle aboutissait dans une tête à laquelle elle ne convenait pas ». Au fil de la lecture, il découvre avoir eu déjà lui-même cette idée.

Pendant une guerre imprécise, Curran était kinésithérapeute dans un hôpital anglais où on soignait les blessés les plus meurtris. Un jeune américain, Chris, était de ceux là. Sa jambe brisée « chatoyait de douleur », ce qui pour son soignant signifiait qu’il avait « une idée, un conception de sa blessure » et qu’en reconstruisant Chris, il le recréait en quelque sorte. Le texte retrouvé fait ensuite référence au sort de Caïn sur lequel le Seigneur mit un signe pour que ceux qui le retrouveraient ne le reconnaissent pas. On y lit l’histoire de Kelley Naufrage qui resta le temps du déluge sur la hampe d’un drapeau, créant grande excitation dans une morne petite ville, devenu « l’amant disparu des délaissés, le bouc émissaire des coupables, le damné des âmes perdues » avant de lasser la population et les autorités. Le récit, qui est la réunion de plusieurs autres textes provenant de sources différentes, se poursuit avec le sort dramatique de Marvello, porteur sur trapèze volant dans un cirque, puis après quelques épisodes sensuels contraires aux idées reçues, glisse comme un fugitif vers une belle histoire d’amour. Quand Chris quitte l’hôpital, Curran se demande s ‘il a créé un être ou l’image d’un être. Et tout finira dans ce phare éclairant un chenal aux « brouillards perfides ». Et quelle est donc cette idée ? Peut-être l’amour, « moelle de son histoire » ?

Les lignes qui précèdent ne sont pas le résumé d’un livre qui ne peut l’être. Ce ne sont que quelques repères pour essayer de tisser de multiples références ou signes, ou symboles entre eux. Mais il faut bien avouer que ceci ne m’a pas paru particulièrement clair. Je me demande s’il n’en est pas de même pour l’éditeur quand on lit la quatrième de couverture « expédiée » en moins de six lignes. Lecteur assidu de William Goyen, je ne m’y suis ni reconnu, ni retrouvé. Bien que la langue soit toujours belle, je me suis beaucoup ennuyé à la lecture de ce livre que je n’ai pas compris.

Mais ce n’est bien sûr qu’un avis.