Déçue parce que, lorsqu'il s'agit d'amour, le femme que je suis est très (trop?) exigeante, et que je n'ai que trop peu vibré.
Déçue car les titres, (des poèmes ou des parties) sont alléchants ("Corps de femme, blanches collines", " Penché dans les soirs", "La branche volée", "Le désir", "Absence", "Les rages", "Les blessures", "L'amour du soldat" "Le goût de ta bouche" "Toujours", "Tes mains" "Ton rire" etc...) et remplis de promesses qui ne sont finalement pas tenues (il n'y a pas toujours de juste corrélation entre titre et texte), déçue parce que je m'attendais à de délicieuses envolées, alors qu'au bout du compte, Neruda use beaucoup trop de la métaphore (la femme comme la mer, comme la fleur...) et de surcroît de manière un peu trop terre à terre, voire un peu éculée par moments (Le corps de la femme "comme une blanche grappe de la lune".)
Pour autant, "Les Vers du capitaine" rachètent un peu le tout, mais en tout cas pas suffisamment et de manière trop inégale pour que ça suffise à racheter ma déception.
De belles fulgurances quand même ("Le tigre", "Ton rire", et dans la première partie, "la Reine") notamment avec "Le Puits", qui est magnifique.
"Parfois tu t'enfonces, tu tombes
dans ton trou de silence,
dans ton abîme tout d'orgueilleuse colère
et c'est à peine si tu peux,
revenir, même en lambeaux,
de ce que tu as découvert
dans la profondeur de ton existence.
Mon amour, que trouves-tu donc
dans ton puits impénétrable?
Des algues, des roches, des boues?
Que voient là-bas tes yeux aveugles
de blessée et de rancunière?
Ma vie, tu ne trouveras pas
dans le puits où tu tombes
ce que je conserve pour toi sur ce sommet:
un bouquet de jasmin qui mouille la rosée,
un baiser plus profond que ton abîme.
Ne me crains pas, ne tombe pas
dans la rancune de nouveau.
Secoue ce mot, le mien, qui vient te blesser,puis
laisse-le s'envoler par la fenêtre ouverte.
Pour me blesser il reviendra
mais sans être guidé par toi
et s'il est vrai qu'il fut chargé d'un dur instant
cet instant par mon coeur sera désamorcé.
Souris-moi radieuse
si ma bouche te blesse.
Je ne suis pas un doux berger
comme dans les contes de fées,
je suis un brave bûcheron qui partage avec toi
la terre, le vent, les épines des montagnes.
Aime-moi, souris-moi,
aide-moi à être bonté.
Ne te blesse pas à moi car c'est inutile,
ne me blesse pas moi car alors tu te blesses."
Sissi - Besançon - 54 ans - 19 avril 2013 |