Catacombes
de Serge Brussolo

critiqué par Kalie, le 7 février 2013
(Sarthe - 54 ans)


La note:  étoiles
Une version démentielle de la maison hantée
Dès les premières pages avec la description métaphorique de l’hôtel particulier, l'élément clé du récit, comparé à une verrue, à un chou-fleur colossal, à la bouffissure d’une énorme meringue, à une baleine crevée et j’en passe ; le lecteur est happé par le style de l’auteur, ici au top de sa forme. Dans la ruelle face à la demeure, le malaise qui s'abat sur l'héroïne donne le ton du livre.

Jeanne, une jeune femme affamée, est engagée par un sculpteur comme modèle dans une grande maison de sinistre réputation. Le sculpteur, une masseuse et un concierge toujours sur le qui-vive sont les seuls occupants du lieu. Bien sûr, Jeanne a vaguement entendu parler de la légende (?) sur la mort du précédent propriétaire découpé par sa famille pour respecter ses dernières volontés et donné comme pâtée aux fauves du zoo qui jouxte la maison (un clin d’œil ironique aux premiers chrétiens morts dans les arènes). Il en est de même concernant les scandales qui ont émaillé la vie du vieux (ses statues moulées dans des squelettes, les trois jeunes modèles qui se sont suicidées chez lui). Rapidement, l’obscurité totale entre le quatrième et le sixième étage (les appartements de l’ancien propriétaire) intrigue Jeanne. Elle fait des cauchemars dans lesquels elle se voit dans la peau du précédent propriétaire découpé en morceaux par ses enfants et petits-enfants. A son réveil, elle a le corps couvert de stigmates… Dès lors, la jeune femme fuit le sommeil pour ne pas se réveiller amputée. Elle finit par s’endormir dans l’une des chambres des suicidées, vêtue des sous-vêtements moisis d’une des mortes… La jeune modèle découvre la véritable identité des occupants de la maison. Une maison hantée qui réclame annuellement son cadavre frais pour en faire de la poudre d'os. Une maison construite sur des catacombes. Une maison dont la poussière d’os de squelettes broyés par une meule a été mêlée à la construction par l’ancien propriétaire illuminé. Une maison qui abrite des gnomes créés par le vieux fou…

L’auteur manie le doute à merveille. L’héroïne est en permanence dans l’incertitude. Elle échafaude une multitude d’hypothèses contradictoires (des plus folles aux plus rationnelles). Magnifiquement bien écrite, chaque phrase de ce roman est un véritable bonheur qui contribue à susciter un sentiment de peur.