Le sixième continent/Ancien malade des hôpitaux de Paris
de Daniel Pennac

critiqué par Marvic, le 13 janvier 2013
(Normandie - 66 ans)


La note:  étoiles
Fable écologique
Ce n'est pas un roman mais une pièce de théâtre qu'a écrit M. Pennac. Même si ce n'est pas la première fois, il s'agit dans cette histoire plutôt d'une retranscription, de la « colonne vertébrale » d'une série d'improvisations jouées par une « bande internationale de comédiens, de danseurs et de musiciens »
C'est une fable écologique racontant l'histoire d'une famille où le grand-père commence par fabriquer des savons, puis les boîtes, passant de l'artisanat à la mécanisation. La famille s'agrandissant, l'entreprise aussi qui finira par devenir avec Théo le petit fils comme PDG, une immense multi-nationale, traitant tous les déchets de la planète... pour les regrouper au milieu de l'océan et en faire un 6° continent.
L'histoire est surréaliste à souhait, les indications scéniques judicieuses mais voilà, personnellement, je ne prends aucun plaisir à lire un scénario (pas sûre que ce soit le bon terme quand il s'agit d'une pièce de théâtre).

Le 6° continent est précédé d'une nouvelle: « Ancien malade des hôpitaux de Paris, Monologue gesticulatoire» où l'on suit 24 heures de la vie de Gérard Galvan, interne au service des urgences qui accepte toutes les gardes,en rêvant de son « bristol ».
Arrive un curieux malade qui ne fait que répéter « Je ne me sens pas très bien » et qui passe sa journée dans la salle d'attente jusqu'à ce qu'il s'effondre par terre. Suivront une série de symptômes, de diagnostics et d'interventions des plus grands spécialistes jusqu'à la farce finale.
Le seul point commun avec le précédent roman de Pennac (Le journal d'un corps ) est la description des pathologies physiques très détaillées; rien ne nous est épargné. Mais c'est bien le seul point commun. Je n'ai pris aucun plaisir à cette farce agitée que je n'ai pas trouvé drôle.
une pièce et une farce 7 étoiles

"Le 6ème continent" comprend deux parties.

La première est une nouvelle intitulée "Ancien malade des hôpitaux de Paris". Le docteur Gérard Galvan est médecin urgentiste. Il passe un temps fou, entre deux urgences, à rêver de sa future carte professionnelle, en lettres dorées et impressions en relief. Oui mais voilà, un vieil homme s'écroule sous ses yeux après avoir poireauté pendant des heures dans son service, après pour seul problème identifié un "Je ne me sens pas très bien" qui ne semble pas très réaliste à notre urgentiste assoiffé de gloire et de prestige.
Cette nouvelle est, pour moi, très caractéristique de la plume de Pennac. On y retrouve ce foisonnement d'idées et de sons qui s’entremêlent pour faire émerger de nouvelles idées et sensations dans un style à la fois un peu loufoque mais toujours intelligent. Dans le traitement de cette courte nouvelle, le Dr Galvan nous parait à la fois et tour à tour superficiel, lâche, courageux et surtout tout simplement humain, et l'on sourit avec bonne humeur de la farce dont il est l'objet.

La seconde partie, qui donne son titre à l'ouvrage, est une pièce de théâtre qui relate plusieurs générations d'une famille qui, partant des savonnettes et des emballages cadeaux et adepte de la propreté, deviendra au fil du temps à l'origine du 6ème continent, composé des déchets planétaires.
Je suis plus mitigée sur cette deuxième partie. Le format pièce de théâtre ne permet pas à l'écriture de prendre son essor, et l'histoire et son déroulement m'ont paru plutôt convenus. J'ai eu du mal à arriver au terme de la pièce. Ceci dit, j'ai été à la fois impressionnée et agacée par les descriptions de mises en scène présentes sur quasiment chacune des pages. Agacée car ces descriptions hachent et gênent une lecture qui ne peut plus être fluide, impressionnée car l'effet en est une pièce vraiment visuelle, dont le lecteur n'a aucune difficulté pour imaginer le jeu de scène. Dans cette pièce, la place laissée au lecteur et à son imaginaire est restreinte. Dommage !

Ellane92 - Boulogne-Billancourt - 49 ans - 1 mars 2013