Manuel anti-sondages. La démocratie n'est pas à vendre !
de Richard Brousse, Alain Garrigou

critiqué par Nabu, le 14 décembre 2012
(Paris - 38 ans)


La note:  étoiles
Les sondages, c'est caca
Le "Manuel anti-sondages" est un livre écrit par Alain Garrigou et Richard Brousse. Sous-titré "La démocratie n'est pas à vendre", ce livre est, comme vous avez pu le deviner, clairement dirigé contre les instituts de sondages.

Le livre, plutôt court (135 pages avec une trentaine de pages d'annexes dont une vingtaine aurait pu être intégrée au bouquin), est découpé selon un plan assez classique et qui fonctionne très bien.

La première partie de l'ouvrage est classiquement consacrée à l'historique et l'origine des sondages. Elle est suivie d'une deuxième partie sur la notion de l'opinion publique. Enfin, les auteurs terminent dans les dernières parties en expliquant comment cette opinion est manipulée par les sondages. Ils abordent également la dégradation de ces derniers pour une meilleure rentabilité ainsi que les alliances entre instituts de sondages, journalistes et politiques.

Ce livre m'a fait beaucoup hésiter et réfléchir pendant la rédaction de cette critique. D'un côté, il aborde un ton très hostile et critique envers les sondages qui sont présentés comme des lobbys faisant un sale boulot, manipulant l'opinion publique, étant incapables de se remettre en question et ayant, en plus, leurs entrées chez les puissants.

Mais, malheureusement pour nous et notre pauvre opinion, les faits présentés par les auteurs semblent crédibles, y croire ne semble donc pas plus fantaisiste que cela.

Ainsi, l'argumentaire des auteurs reposent sur plusieurs faits :

Premièrement, les sondages influencent la population. C'est pourquoi les petits candidats souffrent des sondages. En effet, le citoyen veut que son vote soit utile. En voyant dans les sondages que son poulain n'atteindra pas les 2%, il y a de fortes chances qu'il aille voir ailleurs. Ce qui semble plutôt logique. En effet, on ne se bouge pas le cul le dimanche matin pour un péquenot qui récoltera à grande peine 1.8% des voix.

Bref, quand les boss des instituts de sondages disent que les résultats n'influencent en rien l'opinion. C'est de la bêtise ! Chaque information connue par un être humain va influencer son comportement.

Secundo, les sondages jouent au mystère comme ces gens super ennuyeux qui font "J'ai un secret mais je le dirai pas tralalala" (Ou comme les emos qui veulent attirer l'attention). Et en plus, ces corniauds ont le toupet de se prétendre scientifiques, et ceci, sans avancer de méthode. On sait aujourd'hui, qu'ils ne délivrent jamais les résultats bruts de leurs enquêtes mais qu'ils y appliquent une recette secrète basée sur les résultats précédents. Bref, c'est plutôt craignos niveau objectivité et transparence.

Tertio, les auteurs présentent un biais majeur concernant les sondages. Quand ces derniers sont réalisés sans un contexte de débat, le sondé est alors amené à répondre alors qu'il n'a pas tous les arguments à disposition et qu'il n'est pas en état pour. D'autant plus que dans notre société actuelle, chacun souhaite généralement avoir son avis sur tout.

Le sondé est alors facilement manipulable et peut être aiguillé vers la réponse voulue selon le ton du sondeur, la formulation de la question...C'est le principe du Push Poll (Pépé pour les intimes).
On rajoute à cette manipulation le fait que les commentaires peuvent être biaisés, par exemple en rassemblant les "non intéressés" et les "peu intéressés" et on obtient un bon foutage de gueule digne de "The Expendables" !

Enfin, les sondages ont vu leur qualité se dégrader. On est passés d'enquêtes en face à face à des enquêtes par téléphone et on finit aujourd'hui avec des enquêtes en ligne. L'auteur juge alors que la qualité des résultats est amoindrie mais que le coût de ces sondages est alors diminué pour les instituts. Le processus est alors tout bénef' pour eux.

Les idées des auteurs sont donc bien présentées et plutôt convaincantes. On regrettera cependant une animosité un peu trop prononcée. Par exemple, le livre est fleuri de citations que les auteurs s'empressent de dénoncer en disant qu'elles sont bien nazes.

Les responsables des agences de sondages ne sont ainsi pas épargnés. Et c'est bien dommage, cette hostilité est de trop car l'on sent un ton un peu trop partisan et on peut penser que l'objectivité n'est pas de mise alors que je pense que c'est réellement le cas.

N'hésitez pas à vous le procurer. Le livre n'est pas long et plutôt facile à lire. On regrettera peut-être une faiblesse dans le plan qui oblige le lecteur à effectuer un travail de synthèse pour retirer les arguments de ce livre. En effet, pendant la lecture, je me suis souvent dit "Merde...mais je n'apprends pas grand chose là...". C'est en relisant mes notes et en faisant cette critique que j'ai pu poser mes idées à plat.

En conclusion, si vous êtes intéressé par cette thématique : foncez.
LA FABRIQUE MODERNE DE L'OPINION 7 étoiles

Dans cet ouvrage largement documenté, les auteurs décryptent cet outil diabolique de manipulation des temps modernes qu'est le sondage. Les liens incestueux existants entre la presse et les sondeurs en font un instrument permanent dans le juteux marché de la marchandisation de l'opinion. Un éclairage significatif sur les "push polls" achèvera de convaincre le lecteur sur les effets dévastateurs des questions biaisées, des échantillons biaisés et des commentaires - eux aussi - biaisés..."Les sondages participent à la mise en condition des citoyens et donc à la perversion de la démocratie..." En résumé, les "opiniomanes", qui occupent les écrans, sont des fumistes dangereux.
Par contre, la référence trop fréquente à Bourdieu est suspecte...

Pierre-Alain - - 78 ans - 7 juillet 2013