La fin du village: Une histoire française
de Jean-Pierre Le Goff

critiqué par Falgo, le 17 octobre 2012
(Lentilly - 85 ans)


La note:  étoiles
Comment disparaissent les provences de Giono et de Pagnol
En exergue de son livre, Jean-Pierre Le Goff cite Péguy: "Nous avons connu un peuple que l'on ne reverra jamais."
Cadenet est un gros village du Vaucluse, situé sur le versant sud du Lubéron, au bord de la Durance. Le Goff, sociologue au CNRS, l'a fréquenté pendant près de 30 ans et en a fait l'objet d'une étude sociologique dont il précise la méthode en début d'ouvrage.
Entre 1983, date initiale, et 2010, date d'écriture du livre, le village a subi de très profondes transformations: de village d'ouvriers (vannerie) et de paysans, il est devenu un univers composite dans lequel les populations initiales se retrouvent mêlées à de nouvelles qui ne partagent pas les mêmes traditions. Telle que décrite par Le Goff, l'évolution de Cadenet n'est pas d'une originalité absolue; elle rejoint celles de milliers de villages français. Je n'en veux pour preuve que celle de mon village natal, Lentilly (Rhône), devenu une cité-dortoir de Lyon aux allures de petite ville.
Le Goff s'attache à décrire les changements intervenus dans la vie du village du fait des modifications d'habitat, de la composition sociologique de la population, de la disparition de l'industrie locale, de la réduction de l'agriculture, du bouleversement des mentalités, de l'effacement des solidarités, etc. Le "Bar de Boules", symbole du village, perd peu à peu ses habitués, ses traditions et son âme pour devenir une pizzeria pour touristes. Le tout est à l'avenant.
Si le livre offre de multiples aperçus très documentés et intéressants, il pêche par l'abondance des détails et la faiblesse d'une mise en perspective générale. Les traits propres à l'évolution de Cadenet et ceux résultant de celle de la France ne sont pas bien distingués. Il en suit une certaine lourdeur du texte qui soutient difficilement l'intérêt. Il n'en reste pas moins la certitude que les Provences de Giono et de Pagnol, si différentes l'une de l'autre, ont bien disparu de notre paysage mental. Et que l'on ne sait pas au profit de quoi. Perspective qui, au delà d'une évidente mélancolie, laisse Le Goff inquiet pour l'avenir, position que l'on peut partager ou contester selon sa propre vue des choses. Il n'en reste pas moins que, lorsque l'on dirige ses pas vers la Provence, il importe de ne pas se tromper: il ne faut plus espérer y trouver un folklore qui en est à luire de ses dernières lueurs. Ce qui n'empêchera pas de toujours trouver ce pays merveilleux.
tres bon 10 étoiles

tout l'inverse du commenataire précédent!

Sara croche - - 42 ans - 25 janvier 2013


décevant et irritant 2 étoiles

Si ce livre était un roman, on pourrait dire : "Ce qu'il raconte est truffé d'erreurs, d'approximations, de médisances, mais c'est de la littérature. Dans les histoires, tout a l'air vrai et rien n'est vrai."
Seulement voilà : ce livre n'est pas un roman. L'auteur nous livre la parole d'un expert, censée faire avancer le débat.
Or il ne fait qu'enfoncer des portes ouvertes: la France villageoise n'est plus ce qu'elle était. Le milieu agricole a subi une mutation profonde, etc.
Il accumule des idées toutes faites que tout le monde a envie d'entendre: autrefois, on s'entraidait. Les enfants respectaient l'autorité de leurs aînés, on était heureux de travailler.
Il oppose artificiellement deux façons de penser et de se comporter, attribuant les unes aux "anciens", les autres aux "nouveaux", alors que l'éducation des enfants, le rapport à la nature, à la culture, sont depuis longtemps des sujets sur lesquels les avis sont partagés pour des raisons qui n'ont rien à voir avec l'appartenance ou non à l'ancienne communauté villageoise.
Il décrit de manière caricaturale et tronquée la vie scolaire, la vie associative, la vie agricole, au mépris de toute chronologie...
Que dire de plus ?
Au mieux, l'auteur porte un regard moqueur sur la plupart de ses personnages, et fera sourire le lecteur parisien. Au pire il ravive les braises de la peur de l'autre, de l'étranger (du dedans ou du dehors).
Mais l'impression générale est une grande déception devant un tel gâchis. Il y avait tant à dire sur ce village et ses habitants, sur les déceptions des uns, les espérances des autres, sur les aspirations des anciens étrangers, des nouveaux paysans, des "agricultureux" de toutes origines qui ont choisi ou non de vivre là.

Gknibiehler - - 74 ans - 21 janvier 2013