Pourquoi les guerres, un siècle de géopolitique
de François Géré

critiqué par Bolcho, le 5 décembre 2002
(Bruxelles - 76 ans)


La note:  étoiles
Un siècle de géopolitique
Le titre du présent article est le sous-titre du bouquin. Et cela tombe bien car c’est précisément le sujet du livre : tous les conflits du monde durant le XXe siècle. Avec des cartes bien jolies et pleines de couleurs, du papier glacé, un air assez chicos qui donnera envie de rouvrir l'ouvrage de temps à autres pour vérifier tel ou tel détail. C’est clair, on mise là beaucoup plus sur l’envie de posséder un instrument de référence que sur l'essai pur et dur.
Le livre est construit en trois parties. Première partie : les conflits du XXe siècle. On a les plus connus, comme les guerres mondiales (la Seconde est, par exemple, traitée en 3 pages, ce qui nous donne une synthèse à la va-vite plutôt bien faite ; mais on connaît). La révolution de 1917 à 1924 prend 2 pages et une carte. Il y en a plus dans n’importe quel livre scolaire. On a aussi les conflits moins connus (Inde-Pakistan par exemple). C'est également ramassé mais là, forcément, on apprend tout de même quelque chose. Sur cette partie en général : c’est impossible à lire mais on peut consulter avec profit.
La deuxième partie, « Acteurs et enjeux », est nettement plus intéressante. Elle décrit et commente les grandes causes de conflits : démographie, faim, eau, matières premières, économie, nationalismes, religions, producteurs d’opinion, marchands de canons, organisations internationales, etc. Curieusement, rien sur le fait qu’il faut bien étudier à l'école avant de devenir président d’un grand pays; mais cela, tout le monde le sait de ce côté-ci de l'Atlantique. Cette approche transversale est beaucoup plus riche et permet à chacun de construire son opinion en croisant plusieurs « causes de conflits » de manière à élaborer une grille d’explication s’appliquant à tel ou tel événement.
La troisième partie, « Les conflits du XXIe siècle », fait le tour des foyers de tension actuels. Plein de choses intéressantes, y compris sur l'évolution des armements. Mais avec le même défaut que dans le reste du livre : on parle de trop de choses et trop peu de chacune. Deux extraits étonnants. Enfin, moi je trouve. « La capacité théorique de létalité est passée de 23 morts pour une arme blanche à 43 morts pour un mousquet du XVIIIe siècle, 3 463 pour une mitrailleuse de la Première Guerre mondiale, 575 000 pour un char de la Seconde Guerre mondiale et plus de 695 millions pour une bombe H d'une mégatonne. » Ce qui me fascine ici, c'est surtout le mystère qui se cache en arrière-plan : quel est le calcul qui permet d'arriver à de tels résultats ? Et cet autre. « Au cours de l'histoire, l'occupation moyenne du terrain par combattant a considérablement évolué. On est passé ainsi, pour une armée déployée de 100 000 hommes, de 1km2 sous l'Antiquité à 20,2 km2 lors des guerres napoléoniennes, 248 lors de la Première Guerre mondiale, 2 750 lors de la Seconde Guerre mondiale et 4 000 lors de la guerre du Kippour. »
Les géopolitologues sont décidément de grands poètes.